MARVELOUS. Si vous pensez lire un article sur des supers-héros, passez votre chemin, ActuaBD regorge d’articles de ce type dans sa section Comics. Nous sommes ici face à un OLNI, un Objet Livresque Non Identifié. Ni un roman, ni une BD, ni un album illustré. Il est un peu à la croisée des genres, ou peut-être d’un autre genre. Il attire en tous cas la curiosité.
L’ouvrage commence par 390 pages de dessins doubles pages, tous au crayon, sans texte. Superbes de détails et de finesse, très expressifs. Une histoire de naufrage, d’enfant sauvé, de théâtre… On se laisse emporter par ce « roman graphique » qui nous présente l’histoire de la famille Marvel de 1766 à 1900, une famille de comédiens choyée par le tout-Londres du XIXe siècle, les plus grand acteurs du Royal Theatre. Jusqu’à l’incendie...
Saut dans le temps et changement de forme : une partie romancée nous projette en 1990. Joseph Jervis s’enfuit de son pensionnat pour se réfugier chez son oncle, le mystérieux et fantasque Albert Nightingale. Un oncle qu’il ne connaît pas, qui fuit sa famille comme Joseph fuit la sienne.
Il découvre un homme excentrique, vivant dans le passé. Pas n’importe lequel : il a arrêté le temps chez lui, au point de remettre chaque jour dans des assiettes les restes du même repas, de remplir les verres de la même boisson et au même niveau, de replacer les serviettes de la même manière… Comme si les convives venaient de partir sans débarrasser. L’arrivée de Joseph dans cet univers bien huilé et sclérosé ne se fera pas sans heurts et nous découvrons progressivement les raisons de ce cérémonial immuable lors des 220 pages de texte. Joseph serait-il apparenté à cette famille de grands comédiens du XIXe siècle ? Pourquoi sa mère ne lui en a-t-elle jamais parlé ? Pourquoi est-elle fâchée avec son frère ?
S’ensuivent de nouveau 30 pages de dessins, toujours au crayon et toujours pleines doubles pages, pour boucler la boucle.
Rien de ce qui paraît n’est vraiment. D’ailleurs, le nom de Marvel ne signifie-t-il par « Merveille » en anglais ? Finalement, tout n’est qu’une histoire d’amour, profonde et forte comme peu de gens ont la chance d’en connaître. Il faudra quelques assiettes et verres cassés et surtout arriver à passer outre la douleur de la perte pour appréhender toute la profondeur de cet amour.
Une belle histoire, pour ados et adultes, dont il ne faut pas oublier de lire la postface de l’auteur.
À noter la belle fabrication des éditions Bayard avec une reliure tout de bleu et d’or, même la gouttière (la tranche). « Aut Visum. Aut Non » : Ou bien on voit, ou bien on ne voit pas.
JB
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