Une magnifique ode au premier homme imaginaire qui a rendu la photographie vivante et lui a donné ses lettres de noblesse.
Pour son tout premier album, Nikos Tsouknidas frappe très fort, tant par la qualité et l’originalité de son récit que par la beauté de ses aquarelles. Son intrigue prend place en Grèce en 1838, pays dans lequel un certain Louis Daguerre rend visite à Taki, l’un de ses vieux amis, pour lui présenter une invention et lui demander ce qu’il doit en faire. Cette invention, vous l’aurez deviné, c’est le futur daguerréotype, ancêtre de nos appareils photographiques. Obnubilé par sa découverte, Daguerre se demande s’il doit la garder secrète ou au contraire la révéler aux yeux du monde.
Mais toute l’intelligence du scénario réside dans le fait que ce n’est pas Daguerre le héros de l’histoire mais Marko, le jeune disciple intelligent et bricoleur de Taki. Le jeune homme, très brillant, est accepté dans plusieurs universités de son pays et d’ailleurs mais il ne parvient pas à se décider pour l’une d’elles par peur de partir.
C’est lorsque Taki, brisant la promesse qu’il a faite à Daguerre de garder l’appareil caché, lui donne le daguerréotype que Marko va peu à peu mûrir sa réflexion, tout en améliorant le concept et la prise en main technique de l’appareil. Le retour de sa sœur au pays et le fait de pouvoir prendre une multitude de clichés de son île, de ses amis et de sa famille vont l’aider à prendre une décision.
En voyant les tirages réalisés par Marko, Taki comprend alors l’intérêt de l’appareil : au-delà de l’aspect purement technique, c’est surtout un moyen de figer dans le temps des souvenirs et de révéler les centres d’intérêt d’une personne. Ainsi, sans Marko et Taki, le daguerréotype serait resté une invention vide de sens.
Portraits va donc bien au-delà d’un récit sur la photographie et questionne les notions d’exil, de souvenirs et de regards de l’autre en utilisant Daguerre et son invention comme prétexte à l’histoire.
Un tour de force magistral à lire absolument !
GBé
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