Bernard Heuvelmans, un personnage singulier que le réalisateur belge David Deroy choisi de mettre en lumière. Après Monsieur Etrimo et Manneken Swing, il clôt sa Trilogie de l’échec avec ce nouveau documentaire intitulé Rebelle de la science. La Trilogie de l’échec est une série de documentaires qui s’intéressent à trois figures oubliées du patrimoine socio-culturel belge, qui ont connu l’échec après avoir effleuré le “saint-Graal”, pour finir oubliés de presque tous. Nous avions rencontré David Deroy lors de l’avant-première du film à Bruxelles. Il nous parle de Bernard Heuvelmans, un inconnu pourtant bien connu des amateurs de bande dessinée.
Ce documentaire retrace la vie et les travaux du scientifique belge Bernard Heuvelmans. Qu’est-ce qui vous a tant intéressé dans ce portrait ?
Bernard Heuvelmans fait partie un peu de notre inconscient collectif, sans que l’on s’en rende vraiment compte. C’est notamment le cas à travers la BD pusiqu’il a documenté le yéti de Tintin au Tibet. Henri Vernes intervient dans le documentaire et André Franquin le citait aussi à un moment dans ses influences pour le Marsupilami. Bernard Heuvelmans est un personnage qui fait partie de notre culture mais que l’on a un peu oublié. Ce qui m’intéresse c’est de ressortir ces gens de l’oubli et de les présenter au public.
Lorsque l’on regarde avec notre point de vue d’aujourd’hui la cryptozoologie, cette discipline qui passionnait tant Bernard Heuvelmans, certains restent perplexes…
C’est pourtant une discipline très sérieuse. Lors de ses études à l’ULB (Université Libre de Bruxelles), Bernard Heuvelmans s’était intéressé à la dentition de l’Oryctérope qui est considéré comme un animal en partie édenté. C’est un animal qui existait mais que l’on n’arrivait pas classer dans l’histoire des espèces, un travail que Bernard Heuvelmans a fait. C’était le dernier représentant de son espèce. À travers cet exemple, on voit que Bernard Heuvelmans s’est intéressé à des choses insolites.
REBELLE_TRAILER_ from Martine Barbé on Vimeo.
Comment expliquez-vous la fascination qu’il exerçait sur les auteurs de BD et de romans des années 1950, ?
Tout simplement parce qu’à cette époque, on découvrait les derniers sanctuaires. On parle toujours du Monde fini de Paul Valéry mais après la Seconde Guerre mondiale on arrive aux dernières grandes conquêtes telles que l’ascension de l’Himalaya. Cette passion pour l’inconnu et l’étrange s’est vraiment développée à cette époque-là. Bob Morane s’est emparé de cet univers, Hergé aussi avec ses aventures lunaires…
Henri Vernes raconte d’ailleurs dans le documentaire que Bob Morane avait rencontré toutes les créatures fantastiques que Bernard Heuvelmans étudiait.
J’ai une anecdote à ce propos. Jean-Jacques Schellens, qui était le directeur des éditions Marabout aurait proposé à Heuvelmans d’écrire les aventures de Bob Morane, mais que celui-ci avait refusé car cela aurait nuit à sa réputation scientifique. C’est ainsi qu’Henri Vernes aurait hérité du personnage.
Mais sa réputation scientifique en avait tout de même pris un coup. Il n’était pas pris au sérieux par la communauté scientifique de l’époque. Vous le montrez d’ailleurs très bien dans le documentaire.
Ce qui l’avait plombé auprès de la communauté scientifique, c’est qu’il affirmait que l’Homme de Néandertal était toujours vivant. Selon lui, l’homme pongoïde était une relique de l’homme de Néandertal, qu’il avait étudié. Il avait le fantasme de trouver une relique d’homme-singe qui aurait survécu dans le sud-est asiatique. Quand on lit ses travaux sur l’homme pongoïde, on a vraiment l’impression d’avoir affaire à un roman policier. Il explique comment le pongoïde était arrivé aux USA. Heuvelmans était vraiment dans un délire, qui lui paraissait pourtant cohérent.
Combien de temps avez-vous pris pour faire ce film ?
J’ai mis un an pour l’écriture du scénario et un an pour la réalisation. L’écriture a pris beaucoup de temps car nous travaillons avec des commissions de sélection qui sont importantes pour le financement du projet. Il y a aussi une coproduction de la RTBF et de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
J’imagine qu’il y aura des projections un peu partout dans les cinémas et festivals ?
Oui, mais il n’y a encore rien d’officiel pour le moment. Cependant, il y a eu une projection du film à Lausanne et probablement d’autres dates en Suisse suivront car nous avions tourné des séquences là-bas et que ce pays reste très intéressé par des projections de mon documentaire.
Finalement, que diriez-vous pour encourager les gens à découvrir l’histoire de Bernard Heuvelmans ?
Bernard Heuvelmans était un scientifique qui avait aussi un côté poète. Le pongoïde, qui a été au centre de sa quête scientifique n’est pas arrivé par hasard. Derrière cette créature, il y a toute une philosophie, un mode de vie. Cela ouvrait la porte à quelque chose qui était beaucoup plus profond. Bernard considérait que le néandertalien avait été exterminé par l’homo Sapiens. Ce qui fait un parallèle avec le pongoïde, qui lui, avait été assassiné par une balle de fusil, donc il y avait un parallèle très intéressant à faire.
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(par Christian MISSIA DIO)
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Rebelle de la Science
Réalisateur : David Deroy
Documentaire : 60’
Coproduction : RTBF, WIP
Soutien du Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel de la FWB, Tax Shelter
2017
À voir en ligne :
L’entretien de David Deroy à la RTBF
"Rebelle de la science" (co-prod RTBF) sera diffusé dans l’émission Retour aux sources le 23 mars. Une émission que vous pourrez ensuite voir ou revoir en ligne sur la plateforme Auvio de la RTBF
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