SOMBRE ET VIOLENT. Une nouvelle adaptation en manga du classique de la littérature ouvrière japonaise écrit en 1929 par Takiji Kobayashi qui dérive en trip sadique fantastique. Surprenant.
Dans ce premier tome du Bateau usine publié chez Véga Dupuis, l’ambiance est posée : les personnages que nous suivons sont au fond du trou, au sens propre comme au figuré. Embarqués sur un navire à la hiérarchie stricte, ils risquent leur vie tous les jours pour attraper des crabes géants et enrichir une compagnie dont les objectifs de rentabilité sont sans cesse plus élevés. L’argent que gagne les hommes à bord sert à faire vivre leurs familles qu’ils n’ont pas vues depuis longtemps ou à payer leurs addictions, souvent nées sur le bateau lui-même pour en affronter les dures conditions de vie.
Contrairement à l’adaptation de Gô Fujio et Takiji Kobayashi parue en 2016 chez Akata , celle de Shigemitsu Harada et Shinjiro (à qui l’on doit les séries Fate/Zero et Taboo Tatoo) fait dans le pur sensationnel, allant même jusqu’à l’overdose de noirceur et de désespoir pour mieux enfermer le lectorat dans l’ambiance délétère qui règne sur le bateau. Cet aspect transparaît dans le graphisme ultra-saturé et dans les caractères assez peu nuancés des personnages. De la contremaîtresse sadique au héros assoiffé de vengeance et de justice, en passant par le vieux marin alcoolique et le jeune idéaliste, on retrouve les poncifs habituels de l’éternel duel entre les gentils et les méchants dans ce premier volume.
L’originalité du récit tient ici à sa dimension fantastique, le bateau naviguant non pas en pleine mer mais en plein ciel, suite à une guerre qui a transformé la nature même des océans. Le changement de sexe de l’intendant du récit d’origine, transformé ici en dominatrice sadique, apporte la note sexuelle attendue généralement dans les seinen mais ne change rien à l’histoire en elle-même.
Prévue en cinq tomes dont le troisième sortira en février 2024, la série ravira les fans de seinen plutôt violents, sombres et glauques. Pour les autres, un retour au classique littéraire ou à l’adaptation de 2016 sera suffisant.
GBé
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