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"Green Arrow : The Longbow Hunters" : un récit iconique

Par Vincent SAVI le 21 août 2020                      Lien  
Comme nous tous, Green Arrow vieillit. L'Archer d'émeraude est alors tiraillé par certains dilemmes moraux et sa dernière enquête, qui va mettre sur sa route des trafiquants de drogue, un tueur de prostitués et une assassin yakuza ne va pas épargner notre héros. Découvrez " The Longbow Hunters ", récit iconique du héros à l'arc vert édité pour la première fois dans l'hexagone.

C’est l’histoire d’un riche justicier sans super-pouvoirs, équipé de super-gadgets faisant régner l’ordre en compagnie d’un jeune acolyte à la tenue bariolée... Nous ne parlons pas de Batman, mais bien de Green Arrow qui était à ses origines une véritable imitation du Chevalier noir, l’archer d’émeraude obtiendra même sa propre Arrow-Mobile, sa Arrow-Cave et son Arrow-Jet. Mais les années passant, sous l’impulsion de grands artistes tels que Jack Kirby, Dennis O’Neil ou Neal Adams, le personnage va s’émanciper de l’ombre prégnante de Batman pour devenir une figure incontournable et un personnage fort de l’univers DC Comics.

"Green Arrow : The Longbow Hunters" : un récit iconique
Green Arrow lors de sa première apparition en 1941 dans "More Fun Comics #73"

Assumant sa filiation avec Robin des Bois, le personnage deviendra un justicier social dans les années 1970 à l’époque où le monde des comics commencent à s’intéresser à des thématiques plus politiques. Dans l’excellente série Green Lantern/Green Arrow, de Dennis O’Neil et Neal Adams, notre archer, marqué politiquement à gauche (enfin la gauche américaine...), va parcourir les États-unis en compagnie de Green Lantern, un justicier plus conservateur. L’occasion de confronter le lecteurs aux thématiques sociales de l’Amérique comme le racisme ou l’addiction à la drogue, des sujets encore jamais abordés dans ce genre de récit à cette époque régie par la vétilleuse Comics Code Authority. C’est à cette période que l’Archer d’émeraude gagne ses lettres de noblesses avant de connaitre un passage à vide.

Arrive alors la seconde moitié des années 1980 où l’univers déjà quadragénaire de DC Comics connaît un nouveau départ. Grâce à l’évènement sans précédent Crisis on Infinite Earths de Marv Wolfman et George Pérez, l’éditeur à deux lettres en profite pour faire le ménage dans sa continuité alambiquée, ses terres parallèles et ses moult versions alternatives d’un même personnage. Au sortir des 12 numéros de la maxi-série, les lecteurs découvrent un nouvel univers DC ou tout reste à (ré-)inventer.

John Byrne prend alors en mains la destinée de l’homme d’acier avec notamment la mini-série culte The Man of Steel, George Pérez réinvente avec brio Wonder Woman dans un run qui fera date, enfin, Frank Miller nous livre l’alpha et l’oméga du Chevalier noir avec Batman : Year One et The Dark Knight Returns, deux récits qui marqueront à jamais l’histoire des comics. Tout l’univers de DC Comics repart - presque - à zéro, et un personnage du calibre de Green Arrow ne pouvait pas être laissé de côté.

Comme un air de Robin des Bois...

L’éditeur Mike Gold décide alors de confier la destinée du personnage à Mike Grell, un artiste qu’il connaît bien, à l’origine de la série Warlord, l’un des grands succès de DC Comics à la fin des années 1970 et qui est aussi un dessinateur habitué des aventures de Green Arrow. Dans le sillage de The Man of Steel et Batman : Year One, DC Comics publie alors Green Arrow : The Longbow Hunters, une mini-série en trois numéros dont le ton plus mature et le dessin très travaillé vont marquer durablement les lecteurs et permettre au justicier d’obtenir sa première série régulière.

Pour donner une nouvelle jeunesse au personnage, Mike Grell va ironiquement choisir de le faire vieillir. Oliver Queen a désormais 43 ans, ses jeunes années semblent derrière lui et il se pose des questions sur son avenir et en particulier son envie de paternité. Mais dans une inversion des stéréotypes plutôt bienvenue, ce désir d’enfant n’est pas partagé par sa compagne Dinah Lance alias Black Canary qui préfère privilégier sa carrière de super-héroïne. Le couple de justiciers n’opère plus dans la ville fictive de Star-City mais à Seattle et Oliver troque ses flèches-gadgets contre de véritables pointes. Il abandonne aussi son vieux costume pour une tenue d’influence plus médiévale et avec pour la première fois une capuche, un accessoire qui va devenir incontournable pour le personnage.

Un nouveau départ pour Oliver Queen.

Mike Grell retire tous les aspects les plus super-héroïques du personnage pour en faire un véritable « chasseur urbain », quelque chose qui n’est pas anodin, puisque la postface de l’album nous apprend que l’artiste a lui-même été un chasseur ayant mené des opérations au Vietnam. À l’instar d’un Batman : Year One qui nous présentait une Gotham City plus réel, rongé par la corruption, la drogue et la prostitution illégale. Mike Grell va confronter Green Arrow à un tueur de prostitués et à des trafiquants, point de super-vilains excentriques à l’horizon, l’époque et aux criminels en col blanc.

L’artiste américain livre un récit d’une noirceur rare pour ce type de récit, confrontant Oliver Queen à un dilemme moral de taille qui va le pousser à réaliser l’impensable, une action qui va hanter le héros pendant de longues années. Black Canary n’est pas non plus épargnée et connaît un destin des plus tragiques qui va fortement impacter le personnage et sa relation à Green Arrow. On pourra toutefois regretter qu’encore une fois un personnage féminin soit « sacrifié » pour mettre en avant un héros masculin, un trope encore trop souvent utilisé dont nous parlions déjà dans notre chronique sur Green Lantern : Emerald Twilight. Mais, l’introduction du personnage de Shado contrebalance un peu avec le destin du Canari noir, puisque c’est en effet dans ce récit qu’apparaît pour la première fois la tueuse à l’arc qui deviendra un personnage-phare de l’univers de Green Arrow, à la fois alliée et adversaire.

Green Arrow tire désormais à flèches réelles.

Ce qui fait aussi de The Longbow Hunters une œuvre à part, c’est aussi le sublime travail graphique de Mike Grell, dont la mise en page et le dessin s’approchent du registre pictural.

Black Canary par Alex Toth.

L’album se conclut par deux courts récits, l’un écrit par Alan Moore et dessiné par un Klaus Janson pas très en forme. Bien que très anecdotique, cette histoire mettant en scène Green Arrow et Black Canary permet déjà de voir certaines obsessions du scénariste britannique et préfigure déjà ses réflexions à venir sur les super-héros. Le second récit écrit par Dennis O’Neil et dessiné par le talentueux Alex Toth est une courte histoire consacrée à Black Canary qui vaut surtout pour le talent impeccable de son dessinateur.

La collection DC Confidential de Urban Comics se dote d’un ouvrage solide avec une œuvre-culte de Green Arrow et deux récits qui n’auraient certainement pas pu être publiés autrement et cela aurait été bien dommage, le travail éditorial de l’éditeur français de DC Comics est une fois encore remarquable.

Green Arrow versus Shado

Voir en ligne : Green Arrow : The Longbow Hunters sur le site des éditions Urban Comics

(par Vincent SAVI)

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Code EAN : 9791026819103

Green Arrow : The Longbow Hunters - Mike Grell, Alan Moore & Dennis O’Neil (scénario) - Mike Grell, Klaus Janson & Alex Toth (dessin & encrage) - Julia Lacquement, Klaus Janson & Digital Chameleon (couleur) - Jean-Marc Lainé (traduction) - cartonné - 192 pages - Urban Comics - DC Confidential - 17,50€ - sortie le 12 juin 2020

Contenu VO : Green Arrow : Longbow Hunters #1-3 (1987), Detective Comics #549-550 (1985), Adventure Comics #418-419 (1972) publié par DC Comics.

Illustrations : © DC Comics / Urban Comics

 
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