Les forces occultes aiment par dessus tout se glisser dans le monde des humains. Elles guettent un instant, une brèche pour semer le trouble. La part d’ombre dans le cœur des hommes représente leur porte d’entrée idéale, et lorsque celle-ci s’ouvre à elles, les démons prennent alors possession du corps de leur hôte.
Refermer cette porte et emprisonner ces démons avec un nouveau verrou, telle est la mission de Jônosuke le maître des clefs. Simple serrurier en façade, il traque les forces démoniaques avec l’aide d’un forgeron et d’une divinatrice. Mais lorsque surgit un adversaire bien plus effrayant et plus puissant que tous les autres, il leur faut décupler leurs forces et leur art, quitte à se sacrifier pour faire régner la justice.
Pour créer cette série Shû Akana, dessinateur révélé par la série Yûgo le négociateur [1], s’est associé à Kazuki Nakashima, scénariste œuvrant pour une célèbre troupe de théâtre japonaise et dont Akana avait particulièrement apprécié le travail. Certes, le thème n’est pas inédit, mais le combat du maître des clefs contre les démons révèle bien des qualités, et cette technique d’emprisonnement dans des cadenas offre une originalité plutôt intelligente.
Construite de manière assez classique, la série se découpe en plusieurs histoires indépendantes tenant en quelques chapitres chacune. Les volumes 2 à 4 s’articulent toutefois autour du récit la clef mystérieuse s’étalant sur 16 épisodes, durant lequel Jônosuke affronte le terrifiant Gahômaru. Les aventures du serrurier sont prenantes, notamment le long récit évoqué ci-dessus. Elles bénéficient d’un découpage de qualité sans être tapageur, et la noirceur est utilisée efficacement.
Visuellement, Shû Akana assure. Son style réaliste s’accomode aussi bien de la beauté -charnelle ou non- que du design effroyable des démons. Le dessinateur, comme le scénariste, est à l’aise et retranscrit les ambiances avec la force nécessaire.
Avec d’indéniables qualités, Yamikagishi, le maître des clefs est un seinen [2] de choix. On regrettera une conclusion un peu rapide, les auteurs ayant en effet arrêté prématurément la série au quatrième tome, qui clôt donc le premier cycle. On espère que leur volonté de reprendre les aventures de Jônosuke se concrétisera un jour, car celles-ci mériteraient de s’étendre davantage.
(par Baptiste Gilleron)
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