On est loin du manichéisme de la représentation de cette guerre dans certaines bandes dessinées européennes, encore rééditées aujourd’hui, vue du côté de ceux qui libéraient le monde du péril jaune, des "faces de citron" et des "faces de prune". On n’y voit même pas un soldat ennemi.
Vous n’y trouverez pas de joyeux combattants, fiers de donner leur sang pour la patrie, trucidant d’autres combattants, la rage aux lèvres et la cruauté dans le regard, eux. Par contre, vous y verrez la lente descente aux enfers d’un adolescent et de sa petite sœur, dont la mère a été brûlée vive par les bombes incendiaires, et dont le père soldat ne donne plus de nouvelles.
Ce dessin animé magnifique montre les conséquences de la guerre pour une population civile, les efforts de chaque famille pour survivre alors que tout manque et qu’à tout moment, une bombe peut détruire leur abri. La cruauté et l’égoïsme, aussi, lorsqu’il faut protéger sa famille dans une situation aussi extrême.
Mais il montre également comment des images de la vie -la beauté de la nature, d’une feuille emportée par le vent, le calme du ressac des vagues, le visage illuminé d’un enfant découvrant un rare bonbon - peuvent, pendant quelques instants, faire oublier l’horreur.
L’animation y est sublime, sans besoin de recourir aux effets spéciaux et à l’esbrouffe qui caractérisent tant les productions commerciales, et qui camouflent des scénarios de plus en plus standardisés, marketés, cliché, sans âme.
Si j’en parle aujourd’hui, c’est qu’au moment où le buldoozer de la propagande américaine - censurant ou déformant l’information, inventant des preuves là où il n’y a que des présomptions, usant de la menace et de l’invective faute de vrais arguments - tente d’embarquer le monde dans une guerre contre un peuple qui a déjà suffisamment souffert après deux décennies de dictature, il est bon de se rappeler que la guerre, contrairement à ce que Busch suggère ("The game is over"), n’est pas un jeu vidéo.
Que c’est l’horreur absolue qui attend ceux qui vivent sous les bombes et que les enfants sont les premières victimes. Amnesty International rappelle que 70.000 enfants sont morts après les bombardements de l’Irak en 1991. Et que 500.000 autres sont morts ensuite des effets combinés de la destruction des infrastructures du pays et d’une décennie de sanctions économiques.
"Le Tombeau des Lucioles" n’est pas une bande dessinée mais un dessin animé. Si vous songez à des bandes dessinées qui transmettent le même message, vous pouvez les signaler ci-dessous.
(par Patrick Albray)
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