Blessé, sans doute pour se faire oublier, il décide de se réfugier dans un couvent. Deux ans plus tard, le combattant brutal et son compagnon Maurizio abandonnent la toile de bure pour repartir sur les routes et offrir leurs services aux défenseurs de la république florentine victime d’un siège impitoyable des Luthériens, objet des tentations et des ambitions des grandes familles de l’époque.
Le mercenaire et ses équipiers vont désormais se battre pour la cause royale. Malgré plusieurs exploits spectaculaires et le recours à des méthodes radicales, Fanfulla éprouve les difficultés de la condition de mercenaire, avec son lot d’injustices, de désillusions et de trahisons.
Publiée dans le Corriere dei Piccoli entre 1965 et 1968, Fanfulla décrit l’itinéraire tourmenté d’un mercenaire dans la période de la domination franco-espagnole face à la cité-Etat italienne. Écrit par Milo Milani et dessiné par Hugo Pratt, ce récit annonce le trait que l’on découvrira quelques mois plus tard dans La Ballade de la mer salée, première apparition de Corto Maltese.
La dernière édition en langue française de cette œuvre peu connue de Pratt date de 1981, c’était aux Humanoïdes associés. Cette reprise par l’éditeur de la rue de Sèvres constitue donc une belle opportunité de redécouvrir un récit tombé dans l’oubli.
Dans ce récit flamboyant et foisonnant on devine déjà les marques de fabrique du maître vénitien. L’assaut de la république de Florence par des troupes étrangères -sujet atypique de culture adulte, pas forcément accessible pour le jeune lecteur de BD des années 1960- montre une veine réaliste dans le traitement des personnages. Le recours à de nombreux aplats sombres préfigure les publications de Pratt à venir.
Le physique peu séduisant et le comportement irrationnel et impétueux du mercenaire par exemple fait incontestablement penser à un autre personnage emblématique de l’œuvre prattienne : Raspoutine . Autant d’éléments présents dans un récit au style novateur pour l’époque.
Si la ligne esthétique souffre parfois encore d’assurance ou révèle une insuffisance de travail bien souvent due à la nécessité d’un rendement élevé exigé par ses employeurs, Illustration des débuts prometteurs du créateur de Corto Maltese, cet album n’est nullement dénué d’intérêt bien que l’entrée dans ce récit complexe n’est pas toujours immédiat ou aisé.
Présenté dans un format italien et dans un écrin particulièrement soigné, ce bel objet de 120 pages est œuvre de jeunesse de l’un des auteurs majeurs de la BD italienne. Rue de sèvres entend s’ouvrir vers d’autres œuvres du patrimoine de la BD européenne. Sans être un chef d’oeuvre, celle-ci méritait d’être redécouverte !
(par Patrice Gentilhomme)
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