Hell West, T. 2 : Wendigo – Par Vervisch & Lamy – Sandawe

Rappelons d’abord le cadre de cette uchronie fantastique : en 1875, Les White States of America regardent avec avidité les contrées mystérieuses du « Hell West » qui s’étendent au-delà du Mississippi. L’Ouest est constitué de terres hostiles et inconnues, habitées par des tribus indiennes, mais aussi par une mosaïque de peuples monstrueux...

Civils blancs, soldats de la cavalerie, Frontier Force, Indiens ainsi que les différentes peuplades de monstres vivent dans un climat de paix relatif entrecoupé de petites escarmouches occasionnelles de part et d’autre du mur gigantesque qui protège la frontière.

Mais tout se précipite lorsque la grande prêtresse des Winnocks, peuple d’ombres volantes, est tuée. Dans un accès de vengeance, son peuple tisse des alliances inédites afin d’’exterminer une fois pour toutes les Blancs, ceux qu’ils appellent les peaux moites. La guerre est inéluctable. Et elle sera entachée par bien des trahisons !

Bien des points nous avaient permis de distinguer la cinquième production de Sandawe comme une des productions remarquables de l’année 2012 : un scénario inventif et délirant doublé d’un graphisme impeccable, de l’humour, une kyrielle de des personnages attachants aux motivations aussi diverses que variées.... Bref, ce n’était sans impatience que nous attendions le second tome de cette trilogie annoncée, avec l’espoir que la suite maintienne le niveau du premier opus.

À l’examen, force est de constater que cette suite est tout simplement… différente ! Dès le premier abord, on s’aperçoit que le livre est deux fois plus mince que le premier tome. Éditeurs et auteurs ont-ils réduit la voilure afin de tirer la saga en longueur ? Pas du tout, en fait ! Dès l’ouverture du livre, on se rend juste compte simplement que le papier est très différent, glacé et brillant dans le but de proposer un autre rendu visuel.

« Pour le premier volume, nous avions choisi un papier de très bonne qualité, le Munken Print, qui est énormément utilisé pour les romans graphiques, nous a expliqué Patrick Pinchart, l’éditeur de Sandawe. De plus, il avait l’avantage d’être bouffant et donc de donner un album qui avait de la main, et cette qualité a son prix ! En dépit de ce choix, les lecteurs ont trouvé que les noirs ne rendaient pas aussi bien qu’ils pouvaient l’espérer, et que cela ne mettait pas comme il faudrait le livre en valeur. Pour ce second tome, nous avons donc opté pour un papier couché semi-mat, qui rend les noirs de manière superbe, avec un grammage plus conséquent pour compenser l’abandon du bouffant. Et, effectivement, les lecteurs sont ravis ! »

Lorsque plusieurs années espacent la production de deux livres, il est naturel que la technique du dessinateur évolue, et c’est sans doute ce premier élément qui frappe le lecteur. En lieu et place de l’implacable noir et blanc soutenu par un trait net qui caractérisait le premier tome, le dessinateur Frédéric Vervisch a préféré utiliser la techniques des superbes illustrations qu’il a acquise entretemps. En conséquence, ce second tome multiplie les textures, les dégradés de gris et les effets, renforçant avec brio l’atmosphère de chaque séquence.

Cette évolution diminue certes l’impact des champs larges qui permettaient de déployer de somptueux contrastes noir et blanc, mais les tensions entre les personnages en ressortent mieux exploitées, tant que l’aspect magique que monstrueux.

En effet, après un premier tome qui introduisait le contexte avec beaucoup d’humour et de références, le scénariste Thierry Lamy tempère cet aspect comique pour faire place aux conséquences du cliffhanger qui concluait le premier tome, cet épisode se caractérisant par l’arrivée en fanfare du président des États-Unis himself accompagné de ces deux agents secrets préférés, en référence à la série culte des Sixties : Les Mystères de l’Ouest.

Dernier changement majeur, d’abord annoncé comme une trilogie, cette aventure se conclut... dans ce second tome. Le délai de financement entre les deux albums a sans doute finalement décidé auteurs et édinautes à préférer cette option. Et c’est peut-être ce basculement qui a demandé au scénariste de condenser la trame de son récit et de lui imposer ce rythme « d’enfer ».

Cette différence de rythme entre le premier et le second volume risque de déstabiliser quelques-uns de ses lecteurs. dans un premier temps car, au final, on profite d’un solide western baroque de plus de cents pages, à l’imagination explosive, servi et magnifié par un graphisme hypnotisant.

Les auteurs ont en outre ajouté une dizaine d’lllustrations qui sont autant de cadeaux réalisés au profit des édinautes qui ont soutenu le projet. Cette publication profite de la maîtrise de Sandawe en matière d’édition électronique qui proposer des ebooks à ses lecteurs. Pour 2,50 €, on peut choisir de prolonger le voyage grâce à un art-book de Frédéric Vervisch dédié à Hell West ou pénétrer dans les coulisses de la création en découvrant le scénario et le storyboard associé.