2010. Kuko, lycéenne pleine de vie et de bonne humeur, passe ses journées à se balader dans les rues de son quartier, Kitano, dans la ville de Kobe. Entre son ami d’enfance Kyo, sa meilleure amie Ibu, fan de shojo manga [1], et Outa jeune étudiant en école d’art, la vie semble douce pour Kuko.
C’est ainsi que Kuko prend des photos de Kitano lors de ses balades, les publie sur son blog, passe de temps à autre à l’atelier d’art installé dans le quartier et retrouve Kyo et Ibu pour discuter de tout et de rien.
L’arrivée d’un nouveau voisin, un garçon de leur âge, au mauvais caractère, vient un peu perturber ce tranquille quotidien mais le trouble de Kuko va trouver une origine tout autre, qui surprendra même notre héroïne mais guère son amie Ibu, très au fait de ces choses-là grâce à ses connaissance en shôjo manga !
Il y a une belle douceur de vivre qui se dégage de la lecture de Moving Forward, sans doute en raison de ses décors relativement détaillés et réalistes, basés sur le « vrai » Kitano. Nagamu Nanaji explique d’ailleurs en détail dans des notes entre chapitre le processus de création de ces décors et le souci du détail impressionne, participant pleinement à l’ambiance « reposante » et « naturelle » de la série.
Sur une base classique de shôjo manga, Nagamu Nanaji, connue en France pour les séries Parfait Tic et Koibana - L’amour malgré tout, toutes deux publiées chez Panini Manga, entre 2006 et 2013, tisse un récit allant du côté de la mélancolie avec une héroïne qui a fait de la joie un « devoir », portant un masque permanent de bonne humeur qu’elle semble s’imposer.
Sans dévoiler l’intrigue, Kuko est née quelques jours précédent le séisme de Kobe de 1995, un événement tragique structurant l’œuvre, qui se déploie dans l’ombre du récit, des démons enfermés dans une boîte que Kuko cache au fond d’elle.
Publié de 2011 à 2015 au Japon, comptant onze tomes en tout, le lancement de Moving Forward a coïncidé avec le terrible tsunami de 2011. Une situation qui a amené la mangaka à se questionner si elle devait poursuivre la série, ce qu’elle fera en fin de compte.
La série explore donc le sujet des douleurs cachées avec ses divers personnages qui ont tous un secret, et une fêlure, qu’ils cachent aux autres et mêmes à leurs proches. À travers diverses séquences ou dialogues a priori ordinaires, Nagamu Nanaji saisit parfaitement les non-dits et les hésitations de ses personnages.
Sorte de tranches de vie douce-amère, Moving Forward cueille littéralement le lecteur avec une simplicité qui n’est que la surface d’un récit extrêmement maîtrisé et sensible. Ici, les couloirs du lycée laissent la place aux rues de Kitano afin de pénétrer en profondeur dans cette ville qui a été jadis brisée et d’en rappeler le souvenir, pour ne pas oublier.
Un joli manga de genre sur les souffrances intérieures qui se heurtent aux premiers émois amoureux, le tout dans les rues claires et pleines de vie, et d’espoir, du quartier de Kitano.
(par Guillaume Boutet)
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