24 avril 1854. La jeune duchesse de Bavière Elisabeth (17 ans), que tout le monde surnomme Sissi, devient impératrice d’Autriche en se mariant avec son cousin germain Franz-Joseph. C’est une surprise pour l’Europe car cette frêle jeune fille n’était pas destinée au trône : c’est sa grande sœur, Hélène, qui aurait dû régner. Mais lors de la rencontre organisée entre les deux familles, Franz tombe amoureux de cette jeune femme insouciante, peu préoccupée par le protocole.
Gorgia Marras nous offre un portrait très moderne de l’impératrice ; en avance sur son temps sur la condition de la femme et les mœurs, ouverte d’esprit, attachée à son mari et à sa famille mais encore plus à sa liberté. C’est sans doute le leitmotiv de sa vie.
Être à la tête d’une des plus grandes puissances d’Europe donne plus de contraintes que d’avantages. Elle cherchera par tous les moyens à s’en extraire, quitte à favoriser une liaison extra-conjugale de son époux afin qu’elle puisse voyager comme bon lui semble sans que celui-ci se sente seul, ou encore à pratiquer assidûment la gymnastique, l’escrime et l’équitation, autant de passe-temps peu communs pour une personne de son rang.
Mais elle trouvera surtout une échappatoire en Hongrie, dont elle se passionne à la fois pour la culture et pour la langue. Ce sera son coup de génie et sa chance. En effet, la Hongrie fomente depuis longtemps des troubles contre l’Autriche, qu’elle considère comme un occupant et réclame une constitution autonome.
En se rendant souvent dans cette partie de l’Empire, en y faisant baptiser ses enfants, l’impératrice se fait aimer de ses habitants. Les troubles se calment et lorsque l’Autriche perd la guerre contre la Prusse de Guillaume Ier en 1866, elle peut proposer à son époux la création de l’Empire d’Autriche-Hongrie afin d’éviter un délitement complet de son royaume. C’est ainsi qu’elle est couronnée reine de Hongrie le 8 juin 1867. Cela demeure sa grande victoire diplomatique. Son attrait, réciproque, pour le Comte Andrassy, éminent politicien hongrois, n’y est sans doute pas totalement étranger...
Toutefois, mélancolique, d’aucuns diraient dépressive, elle s’éloigne de la cour, de son mari et de la politique. Le portrait que l’autrice dresse de son personnage n’est pas angélique d’ailleurs. Sissi, bien que très attachée à ses quatre enfants, est assez distante. Souvent en voyage, elle ne les voit plus beaucoup. Sa vie sera marquée par la perte de deux d’entre eux, dont l’héritier du trône, Rudolf, en 1889, dans des circonstances troubles.
Elle est assassinée le 10 sept 1898 en Suisse par un extrémiste italien, Luigi Lucheni, pour qui tous les riches ne méritent que la mort. L’ouvrage se termine par des notices biographiques des principaux personnages rencontrés dans l’album.
L’autrice Giorgia Marras a manifestement effectué un gros travail de documentation. Elle s’est passionnée pour son sujet et a réussi à sortir son histoire de l’ornière d’un portrait soit trop romantique, à l’image des films inspirés par l’impératrice, soit à charge.
Le dessin, assez simple, de même que le parti-pris la mise en couleur, peuvent être un frein pour qui ne ferait que feuilleter l’album. Ce serait dommage car le sujet, autant que la manière dont le il est traité, mérite qu’on s’y attarde et que l’on (re-) découvre ce personnage complexe et hautement attachant.
(par Jérôme BLACHON)
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Sissi, une femme au-delà du conte de fées – Par Giorgia Marras – Ed. Steinkis.