La petite ville japonaise de Soil Newton est une "ville nouvelle", artificiellement créée au milieu d’un désert. La disparition mystérieuse d’une famille de cette ville attire l’attention des enquêteurs sur ses drôles d’habitants, ses monstruosités et... ses décorations florales trop belles pour être honnêtes. Et que viennent faire ces gigantesques colonnes de sels sur les lieux du crime ?
Après l’ultra violent et très crade Bambi (éditionsIMHO),Atsushi Kaneko nous revient avec un album de pure enquête policière : dans une atmosphère caniculaire et suffocante, les deux enquêteurs (un gros lard avec une moumoute qui passe son temps à sentir ses aisselles et se gratter l’entre-jambes, et une enquêtrice coincée et binoclarde) font leur possible pour démêler les nœuds d’une affaire nous plongeant dans une ville au quotidien de plus en plus tordu au fur et à mesure que les personnages apparaissent au grand jour, de sorte qu’au bout du compte, le lecteur désespère qu’il y ait un seul habitant "normal" dans ce bled.
Mais comme le dit le capitaine Yokoi : "Les personnes normales, ça n’existe pas !".
Le style graphique de Kaneko, d’apparence un peu rigide et laisant paraître n’importe quel visage lisse comme une bizarrerie en puissance, semble tout droit sorti de manuels explicatifs : un trait où rien ne dépasse, des hachures d’une précision mathématique, et un sens du détail impressionnant.
Mais Soil frappe surtout par son sens de l’ellipse et son découpage à tomber. L’auteur aime s’attarder sur des détails anodins, souligner la banalité d’une rue ou d’un voisin, avant de nous balancer l’envers du décor dans une double page nous rappelant que décidément, rien ne nous prépare à la suite, macabre et encore plus bizarre.
(par Thomas Berthelon)
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