Le lifting du journal avait été opéré en janvier dernier.Il se caractérisait par une nouvelle maquette, vingt pages supplémentaires, des nouvelles rubriques et surtout le retour des classiques historiques comme Boule & Bill, Gaston, Lucky Luke ou Les Schtroumpfs. 300.000 exemplaires avaient alors été mis en place [1] afin d’assurer une visibilité accrue en kiosque. Dimitri Kennes, l’ancien directeur général de Dupuis, tablait alors sur des retours de l’ordre de 30 à 40%.
On se souvient également qu’au cœur de la fronde du management des éditions Dupuis contre son actionnaire Média Participations, une rumeur alimentée par une note de Jean-Christophe Delpierre, directeur-adjoint des éditions Dargaud, une analyse qui n’aurait jamais du être rendue publique, concluait à l’échec de la relance du magazine.
Aujourd’hui et avec le recul, Olivier Van Vaerenbergh, le rédacteur en chef de Spirou HeBDo se porte en faux contre cette assertion et semble même satisfait du résultat dans le contexte d’une crise de la presse magazine, marquée par l’arrêt récent du mensuel Capsule Cosmique (Editions Milan) et la mise en redressement judiciaire du mensuel Pif Gadget. Il confie à Olivier Le Bussy, journaliste de La Libre Belgique, que les chiffres sont, au contraire, positifs. Ainsi, les ventes en kiosque auraient augmenté de 52% en Belgique, pour atteindre 13.000 exemplaires, et doublé en France pour se porter à 10.000 exemplaires par semaine. [2] Les abonnements ont également subi une progression de 13% pour avoisiner les 80.000 exemplaires. Olivier Van Vaerenbergh s’en félicite auprès de notre confrère : « Nous vendons 100.000 Spirou par semaine, là où on en vendait 70-80 000, alors que le prix a augmenté de 40%. N’importe quel groupe de presse se féliciterait de pouvoir aligner de tels chiffres »
Même si on est loin des ventes espérées par l’ancienne direction (elle avançait un objectif de 180.000 exemplaires par numéro), on ne peut que constater que cette relance est positive. Un article de Bart Lombaerts, dans le numéro de juillet / août de la revue belge Média Marketing, rejoint cette analyse : Il constate qu’en Belgique, Spirou se défend bien, dans un contexte de réduction drastique de l’offre de magazines pour enfants.
Reste à savoir si la croissance du chiffre d’affaires générée par la relance du magazine de Marcinelle permettra d’éponger les coûts de cette relance... Olivier Van Vaerenbergh répond à cette question à Hubert Leclercq, du quotidien belge La Dernière Heure : « Il est évident que cette année, le magazine Spirou va coûter de l’argent au groupe [Média-Participations]. Mais il faut aller au-delà de ce phénomène et souligner aussi les nouvelles séries qui ont été prépubliées dans le magazine ont connu un succès de librairie supérieur aux attentes. Ce qui semble démontrer que le magazine conserve un potentiel de séduction non négligeable ». [3]
Il est vrai qu’à Marcinelle, on a toujours clamé que le principal objectif du journal Spirou était d’être un laboratoire pour les nouveaux talents. Ces dernières années, en effet, des séries récentes comme Les Nombrils (21.000 exemplaires vendus en six mois) ou Parker & Badger (23.000 exemplaires pour le T4) ont confirmé cet adage. Il en va de même avec le Spirou réalisé par Yoann & Vehlmann (40.000 exemplaires) et la nouvelle série de Gazzotti et Vehlmann, Seuls (18.000 exemplaires). Mais il faut admettre qu’elles bénéficiaient également de la notoriété de ces personnages et de ces auteurs.
Indépendemment de ces considérations commerciales, cette relance a impulsé un véritable mouvement créatif puisque cet été, le monde entier a rendez-vous dans Spirou Hebdo qui nous fait voyager au travers des numéros spéciaux plus étonnants les uns que les autres. C’est la Pologne qui s’invite cette semaine-ci avec Marzena Sowa -alias Marzi- comme guide... Dobre ! comme on dit là-bas !
(par Nicolas Anspach)
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