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Tokyo Kaido T1 - Par Minetaro Mochizuki - Le Lézard Noir

Par Aurélien Pigeat le 14 février 2017                      Lien  
Capitalisant sur le succès de "Chiisakobé", Le Lézard Noir sort un titre antérieur de Minetaro Mochizuki, celui qui marqua la rupture dans la carrière du mangaka: "Tokyo Kaido". On y retrouve, aussi bien dans le trait que dans le propos, la beauté poétique et sensible de l’œuvre qui le distingua chez nous auprès de la critique. Mais la démarche apparaît encore nettement tâtonnante, hésitante, pour un résultat qui nous paraît moins abouti.

Quatre enfants présentés, l’un après l’autre, dans leur quotidien. Quatre gamins fracassés par l’impossibilité qui est la leur de s’adapter à leur environnement ou même de l’appréhender. Il y a Hashi, 19 ans, qui ne peut se retenir de dire à voix haute tout ce qu’il pense et ressent ; Hana, 21 ans, prise aussi soudainement que fréquemment d’orgasmes, même en public ; Mari, 6 ans, qui ne voit pas les êtres humains autour d’elle ; et enfin Hideo, 10 ans, victime d’hallucinations, persuadé d’être un super-héros, en contact avec des extraterrestres. Quatre patients suivis dans une clinique spécialisée dans les troubles du cerveau.

Tokyo Kaido T1 - Par Minetaro Mochizuki - Le Lézard Noir
Nos quatre patients et leur médecin
© 2009 Minetaro Mochizuki

D’emblée, le point de départ de ce récit de Minetaro Mochizuki offre à son auteur un vaste champ d’exploration graphique et narratif. C’est le rapport au monde de ses héros qu’il met en scène, interrogeant à travers eux la question de la norme et les filtres sociaux qui conditionnent notre existence quotidienne. Cadrage et découpage permettant d’épouser les différents points de vue des protagonistes.

Tokyo Kaido, série en trois volumes, fut publié au Japon entre 2008 et 2010. C’est avec ce titre que Minetaro Mochizuki débuta en quelque sorte sa nouvelle carrière, laissant derrière lui les modalités classiques de la production manga japonaise. Mais si Tokyo Kaido amorce bien une forme de renouveau, elle apparaît aussi comme une œuvre de transition et d’expérimentation à travers laquelle son auteur se cherche.

Vision hallucinée
© 2009 Minetaro Mochizuki

Sans doute à la manière de son personnage principal, Hashi, lui-même dessinateur et auteur d’un manga qui donne son titre à notre série : Tokyo Kaido. À travers la mise en abyme qui structure une partie du récit, c’est la démarche même de Minetaro Mochizuki qui semble se lire : exploration, extrapolation, hésitation et tâtonnement, dans un contexte de révolte contre une structure perçue comme corsetant et bridant la créativité.

Mais il est difficile de ne pas tracer un parallèle entre cette oeuvre et celle qui l’a chronologiquement suivi, mais que nous connaissons déjà : Chiisakobe, dont nous vous avions dit tout le bien que nous en pensions, et récompensé depuis par l’ACBD et le FIBD. De la même manière que les héros de Tokyo Kaido sont des enfants et adolescents, quand ceux de Chiisakobe sont de (jeunes) adultes, il semble qu’il y ait une différence de maturité, ou de maturation, entre les deux titres.

Mari ne voit pas les musiciens
© 2009 Minetaro Mochizuki

Quelque chose de l’ordre de l’expansion pas tout à fait maîtrisée dans Tokyo Kaido, ou d’un développement un peu méandreux, laissé à la dérive. Comme si la disparition soudaine de Tamaki, le médecin chargé de nos héros, livrant ces derniers à eux-mêmes, s’était répercutée sur l’intrigue elle-même.

Mais peut-être fallait-il ce moment de doute et de recherche pour que grandissent les personnages et l’art de Minetaro Mochizuki. Et quand bien même ce Tokyo Kaido nous apparaît plus fragile et moins abouti que Chiisakobe, il n’en reste pas moins un titre d’une rare beauté, d’une précieuse sensibilité et d’une extraordinaire justesse. Un manga à ne pas manquer en ce début d’année.

Tokyo Kaido, le manga de Hashi
© 2009 Minetaro Mochizuki

(par Aurélien Pigeat)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782353480944

Tokyo Kaido T1. Par Minetaro Mochizuki. Traduction Miyako Slocombe. Le Lézard Noir. Sortie le 2 février 2017. 216 pages. 15 euros.

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Au sujet de Minetaro Mochizuki, sur ActuaBD :
- la chronique du tome 2 de Chiisakobé
- Le Prix Asie-ACBD 2016 décerné à Chiisakobé
- Le Palmarès du FIBD 2017 dans lequel Chiisakobé a remporté le prix de la meilleure série

 
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