« La famille est amour, la famille vous aime », ne cessent de répéter les membres de « la Famille », des personnages mystérieux dont on n’aperçoit jamais clairement les traits de visage. Leurs souhaits et leurs ordres se prononcent comme des slogans, déclamés à l’envi dès lors que les activités des uns et des autres contreviennent à leurs volontés. Dans un futur assez imprécis (les éléments de décor sont minimaux) où l’on retrouve quelques similitudes avec notre présent, la Famille et ses apprentis-sorciers s’occupent de tout, de ce qu’on doit faire et penser, un peu à la manière du Big Brother de George Orwell. Depuis près de 300 ans, motivée par les progrès techniques, elle met au point des technologies avancées qui déshumanisent progressivement la société, médicaments comme objets du quotidien. Plus encore, la Famille intervient directement dans les vies privées : ainsi, adolescent, Alex a été présenté à la jeune fille destinée à devenir la femme de sa vie, Nova. Par bonheur, ils tombent sincèrement amoureux et peuvent ainsi vivre leur amour tout en respectant les volontés de la Famille.
Alex est employé par la Famille, pour laquelle il est chercheur. Il est parvenu à mettre au point une technologie sophistiquée visant à rendre les individus immortels : la dernière faiblesse de l’humanité est sur le point d’être vaincue. Des sortes de clones, appelés répliquants, permettent de garder la même apparence en dépit du temps qui passe. Alex travaille spécifiquement sur la possibilité de transférer des souvenirs, des sentiments et une mémoire sur ces clones, afin que ceux-ci ne soient pas que des copies "physiques". Nova est son cobaye... Mais ils vivent l’expérience de façon très différente. Tandis que Nova fait part de ses sentiments et de l’abandon qu’elle ressent, Alex est accaparé par ses recherches et pressé par la Famille de les poursuivre coûte que coûte, y voyant un marché très lucratif.
Alexandre de Moté nous parle de sentiments, de communication, d’incompréhension, de réconciliation. Le dessin en noir et blanc, les phylactères qui se perdent ou épousent le contour des personnages, les hachures d’arrière-plan, participent de l’incertitude des situations, comme si elles étaient elles-mêmes prises dans un brouillard qui ne se lève jamais.
(par Damien Boone)
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