Le siècle de Jacobs, une exposition biographique

Le Centre Belge de la Bande Dessinée a tenu à dédier une grande exposition biographique au père de Blake & Mortimer afin de commémorer dignement le centenaire de sa naissance. En effet, si c’est le moment idéal pour faire découvrir les multiples facettes du talent d’Edgar P. Jacobs - peintre, illustrateur, affichiste, dessinateur publicitaire, comédien, chanteur d’opéra, scénographe - c’est surtout l’occasion d’évaluer en quoi et comment il est devenu un des auteurs de BD parmi les plus importants au monde. L’exposition " Le Siècle de Jacobs " démontre ainsi que TOUT ce qu’il a fait et appris AVANT de faire de la BD, Jacobs l’a transmuté et réutilisé POUR faire de la BD.

L’exposition permet de suivre pas à pas la vie bien pleine de Jacobs car, heureusement, il fut un maniaque de la conservation. Du premier au dernier jour, tel un Fafnir archiviste, il n’a cessé d’accumuler un véritable trésor : ses tout premiers dessins d’enfant, ses cahiers d’écolier et ses bulletins scolaires, ses perruques et son matériel de maquillage de comédien, ses armes de théâtre, des maquettes de costumes et de décor, des photos de scène et des programmes, des peintures, des dessins et des illustrations, les publications et les catalogues où ses travaux graphiques ont été imprimés, de la correspondance, des notes, des synopsis, des brouillons, des croquis, des études, des découpages, de la documentation, des coupures de presse, des photos de repérage, des modèles réduits... Un tel ensemble de " pièces à conviction " permet d’évaluer le travail d’une vie et annihile complètement et à jamais l’idée reçue - injuste et agaçante - d’un Jacobs dessinateur lent, laborieux et pénible.

La richesse exceptionnelle du " trésor " amassé par E. P. Jacobs au fil de sa vie est telle qu’il a été impossible de résister à la tentation - inhumaine, il est vrai - d’exposer le maximum de documents les plus rares et les plus précieux de sa main. Ceci, reconnaissons-le, au détriment d’un encadrement historique qui aurait - peut-être - permis de mieux resituer sa vie. Si l’imaginaire de Jacobs est né de l’actualité géopolitique et des évolutions artistiques et scientifiques du XXe siècle, cet imaginaire les contient, s’en nourrit, les utilise, les transforme et les concentre, pour les exprimer de façon plus claire et plus forte que n’importe quelle analyse ou étude scientifique ne pourrait jamais le faire. Il suffit de regarder.