La bande dessinée a cet avantage : celui de rendre lisible des choses très complexes, parfois même insupportables à entendre. Gen d’Hiroshima de Keiji Nakazawa était le récit d’un enfant qui avait vécu l’incroyable expérience de la bombe atomique. Palestine, une nation occupée de Joe Sacco, donnait un point de vue palestinien sur l’Intifada. L’une et l’autre de ces œuvres sont publiées chez Vertige Graphic. On comprend dès lors la démarche de la collection Chroniques du proche étranger : celle de rapporter un témoignage qu’aucun autre support –que ce soit le documentaire télé, le livre d’histoire ou le roman - ne peut rendre avec la même émotion.
Avec des personnages de fiction et un scénario inspiré de faits réels, Tamada et Rash se sont penchés sur une guerre qui se passe aux portes de l’Europe, dans le Caucase. En juillet 2000, neuf mois après que la seconde guerre en Tchétchénie ait commencé, un jeune médecin français travaillant pour une ONG et son chauffeur parcourent le pays dévasté. Cette pérégrination est l’occasion d’évoquer le sort de la Tchétchénie qui, depuis près de trois siècles, vit sous le joug de Moscou : les guerres du Caucase, les déportations de 1944 et les deux guerres qui ont abouti à ce que Grozny ne soit plus qu’un champ de ruines. On n’imagine plus qu’elle a été une ville avec des cinémas, des théâtres, des bibliothèques où les gens vivaient paisiblement il y a quelques années encore. Le spectacle hideux de la guerre, la brutalité et la bêtise de la soldatesque, la condition précaire des réfugiés,… rien ne nous est épargné.
Dommage que le dessin par trop sommaire et certains propos d’un romantisme proche de la niaiserie enlèvent un peu de gravité à l’histoire de ce peuple digne.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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