A mi-chemin entre les comédies musicales hollywoodiennes et les opéras rock, L’Homme de Mars marque une avancée dans le genre. Véritable passerelle entre la musique, la bande dessinée, le spectacle, le texte et l’image, l’album se lit, se regarde et s’écoute. Autant dire que ça fonctionne formidablement bien et que malgré son prix élevé, il mérite plus qu’un regard. Sans être original pourtant, le thème de l’histoire pose un constat, celui de l’interrogation d’un homme sur lui-même et sur sa vie. Il se questionne sur son appartenance au monde actuel, sa place dans une société qui lui déplait et dans laquelle il se sent de plus en plus étranger au point de se considérer comme un Extra-terrestre. Alors pourquoi Kent serait-il plus intéressant à ce titre ? Parce qu’il utilise tout ce qu’il connaît du son, de la forme et de la couleur pour décrire ses convictions.
L’heure est au bilan et l’ambiance est morose mais, dit par Kent, l’approche est moins déprimante qu’il n’y paraît.
Lecture mode d’emploi
Lire ce concept album comme le nomment l’éditeur et l’auteur laisse une très grande liberté. On peut s’imprégner du CD seul, on peut lire la bande dessinée dans le silence mais on peut aussi s’installer le livre à la main en écoutant le CD et c’est parti pour une plongée de 50 minutes dans un univers futuriste….rétro ! Parfait pour les Épicuriens.
L’homme de Mars devient très vite attachant. Le dessin met en scène un style SF des années Métal, presque kitch, rehaussé par de fausses couvertures, d’illustrations couleur entre les chansons-chapitres. L’environnement est spatial, aérien, le dessin linéaire idéal pour parler d’un futur fabriqué à ses mesures. Le genre semble venir d’un passé dépassé ; l’illustration sonore plus éclectique que le dessin donne envie de fredonner.
On chante comme Les Who ont interprété Tommy et on ne peut pas s’empêcher de penser à Starmania et bien sûr à la désillusion chantée de Fabienne Thibeault pour sa serveuse automate, à Balavoine et à tous les acteurs de ce chef-d’œuvre.
Pourquoi Kent saurait-il mieux que d’autres mettre cette histoire en musique ? Parce qu’on ne peut pas avoir été le chanteur de Starshooter sans penser musicalité, sans colorer une image par du son. La justesse de son Homme de Mars est touchante. Ses désirs sont palpables, on le suit dans l’utopique espoir d’un monde meilleur. L’opéra compte 17 titres dont on peut écouter des extraits sur les sites marchands habituels et lire les paroles sur le site de l’auteur.
Une méthode contre le piratage
L’œuvre semble hors du temps pourtant elle dynamise le milieu en apportant une solution compensatoire aux manques à gagner sur l’œuvre piratée. Le CD musical peut être acheté seul mais pour connaître l’entièreté de l’histoire et trouver l’émotion que l’auteur cherche à partager il faut lire et regarder l’album-livre en plus de l’album-musical. Le piratage du CD ampute forcément l’œuvre d’une grande partie d’elle même. Toutes les réponses ne sont pas données mais cette idée n’est pas inintéressante. Tous les éditeurs n’auront pas les moyens de s’associer à un tel combat, mais si les structures économiquement fortes s’y mettent et ouvrent la voie pour une fois au lieu de laisser les éditeurs indépendants être précurseurs dans tous les cas, le produit se popularisant, pourrait drainer de nouveaux élans.
Bien réel, l’Homme de Mars est une création très agréable à découvrir.
(par Marie M)
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L’HOMME DE MARS - Par Kent - Actes Sud BD
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