Yvon se cache des occupants allemands, dans la Belgique occupée de 1940. Plusieurs années de vie dans les bois, tandis que son père fait l’autruche dans sa petite maison. Le début d’une rancœur tenace s’installe et quand, enfin, les Alliés libèrent le pays, Yvon ne résiste pas à l’appel du rêve. Le Congo offre des opportunités, et il va y faire fortune, gérant des dizaines d’ouvriers noirs. Son statut devenant enviable, il n’a aucun mal à trouver femme à marier dans son village d’origine et fonde une famille de retour au Congo. Mais la révolte gronde, et Yvon ressent un malaise persistant. Des visions cauchemardesques ou des scènes de chasse le transforment systématiquement en proie, face à des animaux mutants...
Ce périple mêlant survie, espoir, réussite, déchéance et rédemption, Nicolas Pitz le connaît. Son grand-père l’a vécu (le Yvon de notre histoire). Les Jardins du Congo rend hommage à ses ascendants tout en dévoilant la somme des cruautés guettant son destin : la guerre, l’occupation, la colonisation, le racisme institutionnalisé, sans oublier l’absence d’amour filial, entre Yvon et son père. Dès le début de l’album, le chevauchement d’épisodes de différentes périodes (avant/pendant/après la guerre) illustre les questionnements incessants du personnage principal.
Toutes ces émotions doivent se contenter d’un dessin relativement limité en expressivité. Et la variété des paysages, des décors, n’a peut-être pas non plus tout l’éclat voulu. Cet album développe cependant avec panache une saga des plus romanesques, et son final poignant le ponctue avec une grande sensibilité.
Comme apaisement doux-amer, en appendice, quelques pages de photos d’époque, celle d’un bonheur trompeur, reposant essentiellement sur le rapport de force entre blancs et noirs.
(par David TAUGIS)
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