Un itinéraire sur le GPS, une virée en périphérie de Vancouver, un jour de pluie, avec un bus qui se fait attendre. Et des arrêts qui virent aux cas de conscience face à un pigeon agonisant ou avec un client qu’on bouscule alors que l’on n’aurait pas dû. L’amorce de Une soif légitime de vengeance nous inscrit, littéralement, dans les pas de Sonny, un homme à l’apparence bien ordinaire.
Mais ce que découvre Sonny en arrivant finalement à destination n’a rien d’ordinaire. Et, finalement, le lecteur se rend compte que Sonny lui-même ne mène pas une existence si banale que cela. En tout cas, le voilà plongé dans un intrigue qui manifestement le dépasse et l’expose à une somme de violence sacrément conséquente.
Rick Remender (Deadly Class, Black Science, Low...) revient donc avec une nouvelle série ancrée dans le genre du polar. L’action y monte crescendo pour mieux saisir le lecteur et nous immerge dans un univers de "contrats" et de tueurs à gage particulièrement sombre. Le travail sur l’ambiance, d’abord posée autour du quotidien et de l’apparente routine de son héros Sonny, construit un récit dans lequel on se trouve rapidement happé.
Mais c’est surtout la peinture de ce protagoniste qui interpelle. La narration nous situe directement à hauteur de cet homme, discret et taiseux, mais dont les conflits moraux, quotidiens, se trouvent directement exposés. Cette façon de croquer le personnage nous le rend immédiatement humain et met en perspective les autres choix et décisions qu’il se trouve amené à prendre dans la suite du récit. Et c’est cette construction narrative qui rend déjà remarquable Une soif de vengeance.
Le travail de André Lima Araùjo au dessin se remarque notamment aux nombreuses scènes muettes qui jalonnent la progression de l’intrigue. Décors et cadrages renforcent un trait plutôt épuré, pour des moments froidement cliniques. Le découpage des planches jouent des formats rectilignes ainsi que des perspectives pour créer tantôt une minutie dans les passages descriptifs, tantôt un dynamisme dans les moments d’action, le rythme s’accélérant avec la multiplication des cases sur la page. Simple et efficace, cette mise en scène épouse parfaitement le propos du comics, montrant à quel point le scénariste semble avoir laissé carte blanche à son dessinateur pour faire vivre cette intrigue.
Rick Remeder et André Lima Araùjo livrent ainsi un premier tome particulièrement accrocheur, aux zones d’ombre multiples, faisant d’Une soif légitime de vengeance à suivre, assurément.
(par Aurélien Pigeat)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Une soif légitime de vengeance T01. Par Rick Remeder (scénario) et André Lima Araùjo (dessin). Couleur : Chris O’Halloran. Traduction par Benjamin Rivière. Sortie le 21 octobre 2022. 128 pages. 19 euros.
![Serge Monfort : « En lisant, l'enfant devient le chien, comme il deviendrait chevalier dans une BD médiévale ! » [INTERVIEW]](local/cache-gd2/07/a53eabf15a5df16adbd03466676855.jpg?1713070409)
Participez à la discussion