Army Shanks incarne l’archétype du baroudeur des océans : solitaire, mystérieux, téméraire, très orgueilleux... Son but : atteindre Far Arden, une île mythique qui en fait rêver plus d’un. Dans son aventure, Army trouve en renfort une galerie hétéroclite et encombrante de personnages : l’orphelin Alistair, un couple d’étudiants, et même son ex-fiancée, si mal accompagnée...
Cette façon de jouer avec son scénario et ses protagonistes évoque immanquablement le Bone de Jeff Smith. Cannon s’inspire à la fois des grands classiques de l’aventure, non sans un romantisme suranné, mais aussi des contes pour enfants, où les obsessions œdipiennes se nichent au coin des pages. Les ponctuations de l’action par des bulles secondaires encadrant des verbes ("halète", "verse", "gratte", "esquive"...) dans les scènes d’action rapprochent l’esthétique comics des jeux d’enfants.
Devant un tel foisonnement, il est souvent difficile de garder le fil, ou de bien saisir les connexions entre les personnages. Cannon, jusqu’au bout, ne ménage pas ses efforts pour créer la surprise en permanence. Son noir et blanc presque austère ne s’attarde pas sur les décors, ne soigne pas les expressions faciales. Le trait se met au service du rythme, de l’action, des péripéties. Avec ce petit format presque de poche, un tel choix se conçoit, même si parfois on frôle l’expéditif.
Publié aux États-Unis en 2009, Far Arden avait été sélectionné aux Eisner Awards 2010.
(par David TAUGIS)
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