Les yeux des éditions Hibou ouverts sur le passé

Michel & Thierry - L’Intégrale T1

Ed. hibou

C’est mon ami l’écrivain Martin Winckler qui va être content. L’auteur de La Maladie de Sachs m’interrogeait il y a quelques années sur cette BD qu’il avait lue enfant dans Spirou et dont les personnages faisaient de l’aéromodélisme. Je n’ai pas eu de mal à le lui rappeler leur nom : Michel & Thierry et de lui donner un lien sur la page qui leur est consacrée sur l’excellent site BDoubliées.com. En lui apprenant que les éditions Hibou viennent d’en commencer la réimpression, je suis sûr, s’il lit ces lignes, qu’il en passera la commande.

Cornaquée par un passionné, le Belge Marc Impatient, les éditions Hibou capitalisent aujourd’hui une cinquantaine d’ "incunables" de classiques de l’école belge, le plus souvent parus en magazine et jamais publiés en album.

Parmi ses faits de gloire, la réédition d’une autobiographie de référence du scénariste Yves Duval et la publication de pas mal de ses récits complets, quelques introuvables de Dan Cooper, la réédition des albums de Bobo et des Krostons de Paul Deliège (Bientôt le génial "Trou du souffleur"), l’Intégrale de Jack Diamond de Funcken (et bientôt Harald le Viking), Spaghetti, Modeste & Pompon, et Johnny Goodbye de Dino Attanasio et pleins d’autres choses.

Les tirages oscillent entre 400 exemplaires (là, il faut parfois courir vite) et 2000 exemplaires. Grâce aux scanners et à l’impression numérique, ces productions peuvent être mises à la disposition des amateurs à des prix relativement raisonnables de 12 à 21.99 euros pour les plus courants.

Le petit commerce marche bien. C’est un des seuls éditeurs dont les relevés de vente ne sont pas négatifs commente un distributeur. Il faut dire que l’éditeur est prudent et se rend compte de l’exigüité de son marché. En cela, il prolonge le travail initié il y a près de 40 ans par les Rantanplan, Michel Deligne, Chlorophylle, et Bédéscope qui sont des pionniers dans la publication de ce que les libraires parisiens de l’époque appelaient les "belgeries" et qui ont beaucoup fait pour la reconnaissance du classicisme de l’école belge, alimentant les chercheurs et les amateurs en documents jusque là restés inconnus.

Car c’est en document qu’il faut relire l’intégrale des Michel & Thierry de Arthur Piroton & Charles Jadoul dont le premier tome sort ces jours-ci. D’abord grâce à une introduction signée par Louis Cance, dont on ne soulignera jamais assez le travail constant qu’il mène depuis décembre 1973 avec la revue Hop, le seul fanzine encore en activité depuis cette date en France et dont chaque numéro est une irremplaçable mine de renseignements sur la BD d’antan ; ensuite grâce à des histoires qui n’ont pas perdu leur charme.

Michel & Thierry - L’Intégrale T1

Ed. Hibou

Certes, l’aéromodélisme, depuis les années 1960, est devenu moins rudimentaire (avec l’invention des transistors, puis des puces électroniques). Elle s’est même, avec les drones, transformée en armes de pointe.

C’est précisément ce que Piroton reprochait à Jadoul : le fait de sortir ses personnages du domaine de l’aéromodélisme pour les emmener "ailleurs" qui fait que ces récits n’ont pas vieillis et qu’ils gardent leur pertinence. Enquête policière, espionnage et stratégie internationale sont au menu de ce premier numéro immanquable.

À ses côtés, On a volé Valentine de Lucien Meys & Dino Attanasio est une friandise dont le thème n’est pas très éloigné de la célèbre BD de Raymond Macherot (en particulier l’épisode de Chlorophylle : Pas de salami pour Célimène). Qui a influencé l’autre ?

On a volé Valentine de Dino Attanasio & Lucien Meys

Ed. Hibou