C’est un soldat, au faciès écorché, du nez au coin du menton. Il parle à la première personne et on ne connaîtra pas son nom. Tout juste son arme : artilleur. Il est encore marié, et il se fout de la médaille qui l’attend. Son souci : cacher ce visage, et aussi, assouvir ses besoins sexuels. Pas trop le choix des figures. La femme sera de dos, pour ne pas voir. Même la sienne.
Alors, quand il rencontre un grand Noir aux dents de requin, notre mutilé de 14-18 se sent compris, soutenu. Et bientôt, sauvé....
On en croise, des "gueules d’amour" dans ce récit. Des attractions pour la foule, des héros pour les gouvernants, des étrangers dans leur propre pays.Aurélien Ducoudray y a réussi un album aussi marquant que La chambre des officiers, le film de François Dupeyron, sorti en 2001, et adapté d’un roman de Marc Dugain.
En privilégiant délibérément l’obsession du sexe, la mise en lumière d’une frustration dévorante, les auteurs donnent une force peu commune au récit. Tout comme le dessin de Delphine Priet Mahéo, dont c’est la première BD. Du noir et blanc au crayon, avec un gris couleur cauchemar qui domine.
Soucieux de véracité historique, le tandem a confié la postface à Sophie Delaporte, historienne spécialiste du destin des gueules cassées.
Gueule d’amour, fort bien présenté dans son écrin relié, rappelle parfois le Mattotti de Stigmates, par son mélange de violence et d’intense sensibilité, qui traite ces écorchés vifs, ces sacrifiés de la guerre avec une grande humanité.
(par David TAUGIS)
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