Comme cela arrive souvent aux livres marqués des capitales FRMK [1], il n’y pas de narration à proprement parler dans Les Hommes-Loups. Oui mais. S’il n’y a pas séquence, il y a polyptyque, il y a libre association, il y a intertextualité. Les Hommes-Loups renvoie bien évidemment à une imagerie connue, à des symboles fantastiques et fantasmatiques tant du danger dans les contes pour enfants que de la condition humaine chez Hobbes [2].
L’Homme est un loup pour l’Homme, surtout lorsqu’il porte un costard-cravate et une attaché-case. Le livre peut être mis en rapport avec l’actualité sociale, comme avec l’inconscient -collectif ou personnel. Sa fraîcheur et sa simplicité ne sont pas à méprendre pour du simplisme, le livre proposant une variété d’interprétations, le côté quasi-aléatoire et sibyllin de la mise en page lui donnant une vraie dimension interactive : il nous appartient d’imprimer une logique au propos sensible de Dominique Goblet.
Au service d’un propos angoissant, les textes élégants de Guy-Marc Hinant qui avait déjà signé les textes de Souvenir d’une journée parfaite (FRMK, 2002). S’ils contiennent de belles images en eux-même, on ne peut s’empêcher de penser qu’ils sont de trop. Ni pesants, ni discordants, juste superflus, mais assez signifiants pour enlever un peu de ce voile mystérieux qui attire l’oeil de page en page, de figure en rature, de raclure en tache.
Car c’est graphiquement que Dominique Goblet s’impose, plus que jamais. Si son précédent recueil brillait par sa narration subtile et précieuse, il pouvait sembler encore trop appliqué, trop virtuose -trop réfléchi ?- alors que Les Hommes-Loups retourne, questionne le lecteur avec une énergie ingénue et brutale, libératrice et oppressante à la fois.
D’une recherche plastique sur le rapport entre le livre et le mur -certaines pages ont d’abord été exposées en ensemble- l’auteure tire une esthétique de l’écriture par hasards... à moins qu’ils ne s’agisse de rendez-vous : "Un paysage à côté d’un personnage…..Il s’en dégage immanquablement les prémices d’un récit [3]." Un beau livre, par une auteure dont on apprécie à sa juste valeur la rareté.
(par Beatriz Capio)
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Lire notre article du précédent ouvrage de Dominique Goblet : Faire Semblant c’est mentir
[1] Frémok, croisement de Fréon et Amok. Site officiel
[2] Thomas Hobbes, qui donnera son nom au tigre en peluche de Calvin...
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