Au beau milieu de la Première Guerre mondiale, le nouveau champion du monde de boxe Noir émerveille les États-Unis. Et les agace, aussi. L’homme va vite devenir un provocateur, égoïste et malin, devenu riche en quelques combats. En croisant la route d’un dandy européen, le Suisse Arthur Cravan, boxeur mais aussi écrivain scandaleux et ravageur, neveu revendiqué d’Oscar Wilde et figure du mouvement Dada célébré par les Surréalistes. Tout autant mégalo que lui, il y trouve un alter ego dans la démesure vaniteuse.
Centré autour d’un tournant dramatique - le combat entre les deux hommes - ce récit au long cours allie la tradition romanesque du roman graphique et une observation précieuse du monde autour de 1916. Le racisme y sévit encore cruellement en Amérique, et l’obsession de la célébrité et de l’argent facile se joue en quelques contrats véreux.
Forcément, dans ce double portrait tragi-comique, le noir et blanc s’imposait, pour ces deux personnages obsédés par l’idée d’échapper à leur condition. Le dessin de Carlé n’épargne personne, et les victoires au combat n’ont pas plus d’éclat que les défaites.
L’ambition de ces deux "Arthur" repose tout autant sur une mégalomanie impressionnante que dans une farouche pulsion de vie. Les femmes y sont des victimes consentantes, malheureuses et courageuses, et finalement bien plus humaines dans leur admiration sincère, au-delà des jeux du cirque.
(par David TAUGIS)
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