Actualité

Kamandi - Une intégrale qui rend justice à Jack Kirby

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 11 octobre 2013                      Lien  
Découvrez l'un des derniers chefs-d'œuvre de Jack Kirby (1917-1994), le "king" des comics : "Kamandi, le dernier garçon de la terre", livré en deux volumes chez Urban Comics. Une saga puissante, légèrement surannée, mais qui a conservé tout son charme. Un choc vintage.
Kamandi - Une intégrale qui rend justice à Jack Kirby
Kamandi de Jack Kirby
(c) DC Comics

On ne présente plus le "King des comics", l’homme qui a su insuffler au comic-book un lyrisme inédit qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Jack Kirby n’est pas seulement l’inventeur de Captain America, des 4 Fantastiques, des X-Men, de Thor, des Avengers, de Hulk..., excusez du peu, il est aussi celui qui en a constitué la grammaire, avec ses perspectives emphatiques, ses splash pages éblouissantes, ses relances scénaristiques malignes et ses architectures au graphisme proche de l’abstraction qui influencèrent profondément Druillet et bien d’autres auteurs de sa génération,

Kirby, c’est une légende. Hier encore à Francfort, j’entendais deux éditeurs de bandes dessinées, l’un américain, l’autre scandinave, discuter de Kirby. Il habitait, dit l’un, l’immeuble de Frank Zappa avec qui il liait une profonde amitié. Ce dernier était pressenti pour faire la musique du premier Star Wars, et venait demander conseil au "King", son voisin. Jack Kirby, qui venait, selon mon interlocuteur, de connaître une mauvaise expérience en travaillant pour George Lucas, déconseilla Zappa de travailler avec le Tycoon d’Hollywood. Et Zappa suivit son conseil... L’histoire est peut-être controuvée (je n’ai pas pris le temps de vérifier) mais elle donne toute la dimension du personnage.

Kamandi de Jack Kirby
(c) DC Comics

Kamandi est une œuvre de maturité. Elle fait partie de l’époque où Kirby réalise la tétralogie du Quatrième Monde, dernier baroud d’honneur de Kirby chez DC Comics où il avait fait ses débuts avant de faire sa carrière chez Marvel. Il n’a plus rien à prouver, ses plus grandes créations sont derrière lui. Avec Le Quatrième Monde, il fait une œuvre personnelle qui n’a été éditée que de façon parcellaire dans nos contrées. Kamandi est de la même eau, paru de façon sporadique en France chez Artima (mais seul le numéro 59 est inédit en France, me semble-t-il) raconte l’histoire d’un jeune garçon survivant d’un cataclysme qui a bouleversé la terre.

La race humaine est retournée à l’état animal et les animaux ont pris le dessus sur les hommes. Jusqu’ici dissimulé dans un bunker où il a vécu toute sa vie, Kamandi est envoyé en surface par son grand père pour essayer de découvrir s’il reste d’autres humains civilisés. Quête difficile dans une terre où gorilles, pumas, tigres, lions et serpents se font la guerre...

Kamandi de Jack Kirby
(c) DC Comics

Encrées par Mike Royer (qui signe la préface) et D. Bruce Berry, ces pages regorgent de trouvailles et de fantaisie. Kirby illustre cette ménagerie anthropomorphique avec un plaisir évident. La traduction de Laurent Queyssi (studio Makma) et Jérôme Wicky restitue à merveille le second degré de l’auteur qui livre, chemin faisant, sa réflexion sur la marche du monde. Album inévitable.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

🛒 Acheter


Code EAN :

Commander cet album chez Amazon ou à la FNAC

 
Participez à la discussion
11 Messages :
  • Kamandi ne fait pas partie du Fourth World. Les séries qui composaient cet univers étaient : The New Gods, The Forever People, Mister Miracle et Jimmy Olsen, Superman’s Pal.

    Répondre à ce message

    • Répondu par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 12 octobre 2013 à  00:19 :

      Vous avez raison, mon texte n’était pas clair. J’ai donc précisé la chose.

      Répondre à ce message

  • Kamandi - Une intégrale qui rend justice à Jack Kirby
    12 octobre 2013 10:28, par ange bleu

    Une petite question sur l’édition car je n’ai pas eu l’occasion encore de l’avoir en main : quel type de papier est utilisé ?

    Car d’expérience je sais que le papier glacé ne rend pas toujours justice au travail original car les comics de l’époque, comme ceux de Kirby, étaient ancrés et coloriés en vu du rendu de l’impression sur un papier de piètre qualité, et le passage en papier de "Haute Qualité" peut parfois faire pendre au dessin une partie de leur impact et effet.

    Répondre à ce message

    • Répondu par Franck BIANCARELLI. le 15 octobre 2013 à  08:07 :

      Urban fait un excellent travail, donc pour cette intégrale comme pour celle du Batman d’ Aparo, le papier est parfaitement, choisi.

      Répondre à ce message

  • Kamandi - Une intégrale qui rend justice à Jack Kirby
    14 octobre 2013 17:40, par la plume occulte

    On l’appelait le King.Jack Kirby était de ces artistes qui ont donné toute sa dimension à l’art séquentiel:précisément celui de la BD.Dimension est à prendre ici dans tous les sens du terme.Attention les yeux.Frank Frazetta disait qu’une image réussie devait faire l’effet d’une balle entre les deux yeux.Jack Kirby,lui,vous assénait sa vérité avec la force du marteau de Thor,un de ses personnages emblématiques,sur le sommet de l’occiput :

    -Narration.Boum.

    -Conception et agencement visuels.Boum.

    -Cinétique des planches.Boum.

    -Subtilité du chemin de lecture.Boum.

    -Ambition graphique et esthétique.Boum.

    On l’appelait le King.

    Mais ça ne lui suffisait pas pour vous laisser pantelant le souffle court.Le bonhomme était doté d’une créativité sans bornes et,d’une imagination à laquelle il n’accordait aucune limites.Pensez donc,il a créé sans sourciller Ego un homme planète.http://en.wikipedia.org/wiki/Ego_th... Un boulard vivant.Un concentré de quant-à-soi à rebours hégémonique pas possible.À donner des complexes à une certaine association ,vendue comme nouvelle,avec son cortège de Menu fretin.

    Mais retournons sur les hauteurs:Stan Lee,pour un épisode des 4 Fantastiques, avait donné à Kirby comme seule indication"fais-leur affronter Dieu".Kirby créé alors Galactus le dévoreur de planète,et son poisson pilote le christique Surfer d’argent.

    On l’appelait le King.

    Jack Kirby c’était aussi la maîtrise.Accompagnée d’une formidable force de travail.Imaginez-le,à la suite de ceux qui l’ont vu faire,attablé à son poste de travail,alors qu’il était au sommet de son art,commencer une planche d’un seul élan par le haut du côté gauche et la finir par le bas du côté droit,sans quasiment lever le bout crayon et utiliser la gomme.Ce qui lui permettait nonchalamment de dessiner ses 4 ou 5 épisodes par mois.Plus quelques autres travaux divers.Et du solide.Pour le moins.On rappelle ici pour la bonne bouche la fameuse" échelle de Kirby":jusqu’à dix planches de crayonnés par jour.Et pas moyen,à l’époque, de se planquer derrière les commodités de la tablette graphique.

    On l’appelait le King.

    Cette vélocité graphique et créative lui aura d’ailleurs paradoxalement coûté cher puisque ,en supplément de quelques autres agaceries éditoriales et juridiques,elle sera la principale raison de son divorce avec la maison Marvel. Allez comprendre.Un divorce cataclysmique au point qu’un John Buscema, à qui on avait demandé de faire rapidement le tampon graphique à la suite,était persuadé que la maison Marvel n’en avait plus que pour quelques semaines à vivre.

    On parlait plus haut de la cinétique des planches de Kirby.De cette manière de donner une énergie particulière à chaque case,chaque personnage,chaque trait.Pour faire de chaque page une véritable épopée.On a vu, dans cette manière, un héritage direct de la jeunesse de Kirby passée dans le quartier populaire du Lower East Side.Où il ne fallait pas hésiter ,pour imposer un minimum de respect au tout venant,à castagner et jouer de la mandale.Will Eisner a raconté plusieurs fois comment ,alors qu’il employait Kirby dans son studio,il avait vu débarquer deux types menaçant,qui,pour une obscure affaire de service de serviette propre,qui dissimulait mal une tentative de racket ,se mettaient à froncer les sourcils.Surgit tout poings dehors comme un diable de sa boîte,Kirby,pourtant de petite taille,s’est mis à apostropher les deux hommes au point de les faire reculer et tourner les talons...

    On l’appelait le King.

    La machinerie visuelle et narrative de Kirby toute en tension,extirpée de lui-même,fruit de son vécu,doit beaucoup à l’expérience de cette jeunesse faite de confrontation et de manques.Où l’imaginaire sert de palliatif et permet d’échapper à l’entourage pas toujours souriant.Comme quoi:pour marquer durablement de son empreinte le joli monde de la narration dessinée,il ne faut pas ,absolument, être un digne fils à papa.En tout cas dans l’optique de toucher le plus grand nombre....

    Du passage de Kirby chez DC comics ,il reste quelques séries édifiantes ;dont Kamandi ,œuvre de commande de l’éditeur qui voulait surfer sur le succès de La Planète des Singes,est un exemple parfait .Séries édifiantes qui réjouissent le cœur des fans.Des fans nostalgiques.Des séries qui, même si elles n’ont jamais crevé le plafond des ventes,et n’étaient pas toujours raccord avec la politique éditoriale de DC à ce moment là, restent marquantes.

    Certains y ont vu le début de la fin pour Kirby.Avec une inspiration asséchée,un décalage avec le goût des lecteurs .Qui s’éloignent.Mieux ou pire:le style kirby qui se démode.Avec son choix du plus graphique,une surenchère esthétique,des anatomies de plus en plus stylisées,un dédouanement envers tout réalisme cru,pour le coup dissonant ,qui peut passer pour maladresse ,et empiète sur la narration pure.Une manière trop lourde de flatter l’esthète plus que le lecteur basique.Pour ces mêmes "certains" Kirby s’est égaré. Jusqu’où l’aspect visuel peut -il empiéter sur le confort narratif ? Éternelle question...

    Kamandi ,ici chroniqué,donne à voir des planches de Kirby pleines de tension et de fougue,où les trouvailles visuelles se multiplient.On entre de plein pied dans l’action en acteur privilégié.Secoué de toutes parts par les sollicitations esthétiques et narratives déployées virtuosement par le maître .Et bien d’autres choses.Tel était le talent de Jack Kirby.

    On l’appelait le King.

    Ne vous demandez plus pourquoi.

    Répondre à ce message

    • Répondu par Alex le 15 octobre 2013 à  00:07 :

      Un bien beau texte Mr Plume...

      Répondre à ce message

    • Répondu par Oncle Francois le 15 octobre 2013 à  12:09 :

      Bravo pour cet excellent hommage, Ami occulte, qui donne fortement envie de se précipiter vers l’album Kamandi. Si ma mémoire est bonne, cette série fut traduite en France par Arédit vers 1975, en petit format noir et blanc pour adultes, puis en Couleurs (présentation proche de celle de Strange, un peu plus luxueuse encore : couverture semi rigide glacée). Malheureusement, la traduction rendait les dialogues bizarres, et je crois me souvenir que les textes étaient tapés à la machine, ce qui n’est pas agréable à l’oeil, vous en conviendrez.

      Répondre à ce message

      • Répondu par la plume occulte le 16 octobre 2013 à  12:23 :

        Merci à vous.Ce n’est que le plaisir du partage.Entre passionnés.Et les autres.Surtout les autres.Le contraire d’une certaine crispation ambiante dans la BD actuellement.

        Répondre à ce message

    • Répondu par la plume occulte le 16 octobre 2013 à  12:18 :

      Le lien pour Ego le boulard vivant à donner des complexes à qui de droit est plutôt celui-ci :http://en.wikipedia.org/wiki/Ego_the_Living_Planet

      Précisons que le style de Kirby ,avec ses partis pris de stylisation et mieux-disants esthétiques,a pu alors-on est en 1970- se "ringardiser" aux yeux du grand public ,quand au même moment, John Buscema,qui prenait de l’ampleur,amenait son dessin plus réaliste fait 100%de mémoire et, fortement inspiré ,dans le cadre de la Marvel way,par la machinerie narrative de Kirby(on avait forcé la main à Buscema qui possédait pourtant son propre style)sur les séries .Neal Adams de son côté arrivait avec son réalisme photographique tout droit issu du comic strip.

      Pour beaucoup ces séries,souvent de super-héros ,devenaient ainsi plus crédibles.Encore un éternel débat.

      Précisons encore ,que si Kirby à voulu créer ses propres séries et ,surtout ,ne reprendre que" Jimmy Olsen, Superman’s Pal"série déjà existante:c’est parce qu’il ne voulait pas ,en arrivant chez DC comics, prendre le travail d’autres artistes et les mettre au chômage.

      On vous dit qu’il était le King.

      Répondre à ce message

  • Kamandi - Une intégrale qui rend justice à Jack Kirby
    15 octobre 2013 23:08, par Michel Dartay

    Quel plaisir de voir qu’un éditeur prend soin de publier une intégrale de Kamandi, paru chez DC vers 1973. En effet, si l’oeuvre de Kirby chez Marvel commence à être connue chez nous (panini ayant réédité beaucoup de ses plus belles séries, parues de 1961 à 1969 chez Marvel US, le début du Marvel Age dont il est le principal fondateur, avec l’aide de Stan "The man" (sans majuscule sur le m selon moi : il s’est accaparé richesse et gloire au détriment de ses créateurs les plus doués (Kirby et Ditko, notamment), et il vient de perdre un procès contre Disney qu ’il avait attaqué pour contrefaçon de ses séries !) Lee comme éditeur et comme dialoguiste (en vrac, Captain America, Fantastic Four, Avengers, Iron Man, non, ce n’est pas un programme de films à succès !).
    Les détails que donnent la plume occulte sont véridiques et tirés de livres en américain, que les spécialistes du comics peuvent avoir lus.
    Pour ma part, je me contenterai de donner quelques indications rapides ;
    1) De son séjour de quelques années chez DC, et parmu les multiples séries qu’il y a créées ou reprises (Jimmy Olsen), Kamandi est la plus longue. En effet, lorsqu’il démissionna de Marvel vers 1969, son ami Carmine Infantino, editor in chief chez DC, lui proposa un contrat intéressant : la possibilité de publier trois comics par mois ! Une cadence à laquelle le King était habitué chez Marvel (sans que le travail ne soit bâclé ; il suffit de voir les splendides photocopies des crayonnés de ses planches dans The Jack Kirby Collector pour en être persuadé).
    Mais il y avait une contrainte : pour assurer leur continuité, il fallait que les ventes de comics soient satisfaisantes. On a donc vu Jack Kirby lancer de nombreuses séries, dont la majorité s’est arrêtée après un an ou deux maximum : la fameuse tétralogie liée aux New Gods bien sûr, mais aussi Omac et Demon. Seul Kamandi parvint à survivre prés de cinq ans (environ soixante numéros).
    Le fait que Kamandi ait duré plus longtemps ne signifie rien quant à l’intérêt intrinsèque de la série, qui formidablement encrée par Mike Royer à ses débuts, sombrera ensuite dans les doigts de Berry.
    2) La lecture des comics écrits par Jack Kirby seul chez DC peut laisser une amertume au lecteur : on n’y retrouve pas la "patte" des "reader-friendly" dialogues de Stan Lee, qui arrivait à établir convivialité et connivence avec ses lecteurs. Les dialogues de Kirby sonnent un peu sec, ils sont abrupts et ne parviennent pas à sublimer le formidable contenu des cases. Ce n’est pas forcément la faute des traducteurs (j’ai lu la plupart de ces comics en VO, et même là, il y a un déficit), donc à la limite, il faudrait un traducteur ou un scénariste capable d’enrichir ces fameuses bulles en français. Pas facile !

    Répondre à ce message

CONTENUS SPONSORISÉS  
PAR Didier Pasamonik (L’Agence BD)  
A LIRE AUSSI  
Actualité  
Derniers commentaires  
Abonnement ne pouvait pas être enregistré. Essayez à nouveau.
Abonnement newsletter confirmé.

Newsletter ActuaBD