Il ne se passe pas une année sans que la bande dessinée française n’arrive à placer l’un de ses titres à l’écran. Ce mouvement impulsé depuis les années 2000 ne semble pas se tarir, que ce soit en puisant dans les séries commerciales tout-public comme Astérix, Les Profs, Le Marsupilami, Boule & Bill,... ou Valérian de Mézières & Christin annoncés chez Luc Besson.
Mais les romans graphiques d’auteur ne sont pas négilgés, comme en témoigne Lulu Femme nue de Solveig Anspach adapté de la bande dessinée d’Étienne Davodeau (Futuropolis) en ou encore La vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche, tiré de la BD Le Bleu est une couleur chaude de Julie Maroh (Glénat). Le groupe Média-Participations, propriétaire de Dargaud, Dupuis et Le Lombard, aurait, au travers de sa filiale Mediatoon, pas moins de 60 films en cours de développement.
Du papier à l’écran
Le Combat ordinaire a valu la notoriété à Manu Larcenet qui reçut pour cet album le Prix du meilleur album en 2004 à Angoulême. On ne retrouve pas à l’écran, forcément, le graphisme décalé et expressionniste du dessinateur, nécessaire contrepoint aux idées noires d’un photographe trentenaire aux affres de l’interrogation existentielle. Mais le réalisateur Laurent Tuel, que l’on avait découvert sur La Grande Boucle et Jean-Philippe utilise un subtil équivalent : une touche esthétisante et nostalgique avec une caméra qui s’attarde sur les visages, les attitudes, les paysages industriels et, d’une manière générale sur les petits riens de l’existence qui disparaissent inexorablement, noyés dans la marche du monde. Le cinéaste reste globalement fidèle à la bande dessinée et les fans retrouveront sans peine l’intrigue et les dialogues cultes qui les ont séduits dans les quatre albums parus chez Dargaud.
On est surpris par le choix de Nicolas Duvauchelle pour le rôle principal. Ce beau gosse en effet n’a pas une tête de blessé de l’existence. En réalité, c’est Manu Payet qui était pressenti, mais ce choix ajoute une subtilité supplémentaire dans le duo que l’acteur forme avec l’actrice Maud Wyler. Et cette stylisation donne encore plus de vérité au décalage de jeu avec les seconds rôles, ouvriers et dockers, des "gueules à la Larcenet" incarnées par des acteurs non-professionnels.
Bref, ce passage de l’univers de Larcenet à l’écran séduit, même s’il aura fort à faire cet été contre les Minions et autres hommes-fourmis qui envahissent les salles en cette saison.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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