Son auteure, Sandrine Revel, n’est pas une inconnue dans le petit monde de la BD. Cela fait près de 15 ans qu’elle y roule sa bosse. Un premier album en 1996, Jouvence, la Bordelaise (Editions Atlantic Production), les albums de Bla bla bla ! (Éditions Le Cycliste,1998) qui se font remarquer des spécialistes, L’avenir est un paradis avec Claude Bourgeyx pour Sud Ouest Dimanche (2000), et enfin, à partir de 1997, la série Un drôle d’ange gardien scénarisée par Denis-Pierre Filippi (Éditions Delcourt), sept volumes parus entre 1999 et 2008, primés à Montréal et récompensés d’un Alph-Art Jeunesse en 2001 à Angoulême ! Une série pour enfants, fraîche et poétique, qui ne demande qu’à être réactivée par son éditeur. On compte aussi avec Les Bonheurs de Sophie (avec Jean-Marc Mathis , Pt’it Paquet, 2003), Petitchat et la lune (Carabas, 2007) et Le Jardin Autre Monde (Delcourt, 2006) à nouveau avec Filippi.
Mais Sandrine Revel ne s’enferme pas dans le seul registre de la littérature pour mômes. On lui doit notamment un témoignage remarqué sur le 11 septembre 2001 à New York, Le 11e Jour (Delcourt, 2002), Intérieur Jazz : Extrait de la vie d’Eva Wood (Editions Charrette, 2003) et Monsieur Régis où elle retrouve Claude Bourgeyx (Les Enfants rouges, 2009).
Résurgences
La voici qu’on la retrouve sur un nouveau projet, Résurgences : Femmes en voie de resociabilisation, un album dont elle a l’idée en se rendant un jour au Centre d’Information des Femmes et de la Famille (CIFF) de Bordeaux. Là, elle rencontre huit femmes qui font un stage de resocialisation. Elles sont toutes en rupture, pour certaines dans une grande détresse morale et financière. Leur sort la touche, elle décide d’en faire une BD.
« Elle s’est construite jour après jour. nous raconte Sandrine, J’ai récolté de la matière. Je les ai interviewées. Je les ai prises en photo et filmées. Ce n’est pas un livre militant. Je ne suis pas féministe comme Chantal Montellier. Je ne suis pas dans la revendication. C’est un livre qui est dans le ressenti de ces femmes qui sont dans le questionnement, qui sont en train de renaître. C’est un livre témoignage, un problème important dont il faut que la presse s’empare. Ce sont des femmes qui, aujourd’hui, vivent mal, qui souffrent, qui sont dans la précarité. C’est quelque chose qu’il faut absolument souligner et mettre en lumière, pas simplement en tant que démarche. Il faut que ce soit un sujet d’actualité qui revienne autant que possible parce qu’il y a un réel vide pour ces femmes qui ont 48 ou 50 ans, qui sont sans travail et à qui on propose des emplois temporaires ou partiels. Les hommes sont aussi parfois dans ce cas, mais ils ne sont pas, comme elles, dans la situation de femmes seules avec enfants. C’est là que cela flanche. C’est déjà difficile pour une femme de trouver un emploi parce qu’elle a des enfants à charge et que cela peut-être un point négatif pour l’employeur. Le fait qu’elles soient dans une situation précaire génère des conséquences : les enfants en souffrent, se retrouvent en échec scolaire, etc. C’est un engrenage. »
Le soutien d’un ministre
Elle n’a pas contacté 10.000 éditeurs pour publier son projet. Vincent Henry de la Boîte à Bulles, a répondu très vite présent. Il a lancé le livre récemment à Paris en présence du secrétaire d’État à l’Emploi auprès de la ministre de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi, Laurent Wauquiez , grand amateur de BD (voir notre entretien) et intéressé par le sujet de cette BD qui parle d’un cycle de formation peu connu du grand public.
Sandrine Revel apprécie cet appui, mais garde néanmoins la tête froide : « Je ne suis pas sûr que ce livre fera bouger beaucoup les choses. Mais il est là, ce livre, j’aimerais que l’on s’en serve comme un outil, que l’on organise des tables rondes, des débats, qui ont feront bouger. Qu’il devienne un prétexte, en fait, pour faire avancer les choses. »
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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