Un démon peut-il avoir peur après avoir affronter les pires difficultés sans broncher ? Faut-il admettre qu’un parricide tuant froidement sans état d’âme ses parents puisse ressentir la moindre émotion ? Est ce la douleur qui fait mal ou l’absence de sensations fortes ?
Tant de questions que se pose Ryô Narushima tourmenté dans ses entrailles, en perte de vitesse, dévalant une pente raide sans issue ! Coq de combat se retrouve plus seul que jamais, meurtri dans son âme, son corps et son esprit démuni de sa perspicacité à combattre.
Sa force vitale à survivre dans les pires conditions s’est totalement délitée nous livrant pour la première fois depuis longtemps un Ryô fatigué, affaibli, sans trop de convictions quant à ses desseins.
Et néanmoins, plus la situation s’avère critique, plus le démon de l’Orient puise au plus profond de ses réserves et s’affiche au monde entier tel qu’il est : un homme solitaire ne dépendant de personne, doté d’une capacité à survivre incomparable, doublé d’une agressivité animale hors normes, à la recherche d’un accomplissement personnel d’une quête sans temps mort où son seul idéal est de survivre à n’importe quel prix.
Ryô Narushima est un anti-héros, qu’il sorte victorieux ou perdant, les foules, à l’unanimité, ne lui vouent que haine et mépris, en raison de son triste passé de meurtrier de parricide (il a tué père et mère). Pire même, lors de ses victoires, le peuple à l’unisson exprime sa colère en scandant son nom avec dégoût et répulsion.
Des femmes entre deux âges s’excitent sur les combats clandestins et s’offrent les prouesses sexuelles de l’animal qu’est Ryô. Ces sentiments à son égard, Ryô n’a qu’en faire, depuis toujours confronté à son destin de rébellion, il recherche cependant une voie de sortie de son état régressif.
Que peux rendre à Ryô Narushima sa soif de survie, son énergie quasi illimitée à combattre créant le génie de sa personne ? Une seule réponse, un seul individu, son pire ennemi : Naoto Sugawara !
Plus de cinq années d’attente, une durée interminable pour les fans, touchés par l’un des manga Seinen les plus mémorables de tous les temps ! Coq de combat (Shamo dans sa langue japonaise) est indispensable à tout amateur de BD bien né.
Akio Tanaka ainsi que les éditions Delcourt reviennent sous les feux des projecteurs et nous administrent une œuvre magnifique d’intensité au scénario ambitieux, satire politique dénonçant les pratiques de certaines maisons de corrections ainsi que l’univers du monde du spectacle. Ce climat violent s’accomode parfaitement à un dessin hors norme, sombre à souhait, nous laissant pantois par son réalisme exacerbé. On perçoit le bruit des os broyés à chaque plan, on voit la sueur et le sang jaillir des combattants, la force mentale et l’adrénaline qu’ils émettent.
Les éditions Delcourt rééditent chaque tome deux par deux, chaque mois, le tome 1 affichant d’entrée de jeu le côté pervers de la série.
Un petit conseil pour les nouveaux lecteurs de cette série : Lisez les volumes un par un, n’entamez le tome 20 uniquement que lorsque vous aurez lu les précédents car le scénario y va crescendo et vous risqueriez de perdre le suspense...
(par Marc Vandermeer)
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