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Bande dessinée : Aya de Youpougon, la meilleure comédie de l’année 2023

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 3 janvier 2024                      Lien  
La fin de l’année 2023 a vu paraître le 8e tome de la série Aya de Yopougon de Marguerite Abouet et Clément Oubrerie. Cette comédie -un genre rare dans la bande dessinée francophone- qui se passe en Côte d’Ivoire dans les années 1970 dans un quartier populaire d’Abidjan, Yopougon, raconte l’histoire d’Aya, 19 ans, qui ambitionne de devenir médecin, « pour éviter la fameuse série « C » : couture, coiffure et chasse au mari ». Ce faisant, les auteurs font la sociologie d’une population à la langue et aux pratiques qui nous sont totalement inconnues, avec charme, intelligence et humour. Les aventures d’Aya sont prenantes, singulières et profondément humaines. Le « Prix Jacques-Lob du scénario » et « personnalité de l’année » pour ActuaBD en 2022 réussit l’une des meilleures comédies de l’époque, sobrement et efficacement mise en images par Clément Oubrerie. Si vous ne connaissez pas cette BD-là, découvrez-là cette année.

Tout tourne autour d’une poignée de personnages charismatiques : Aya, une jeune femme ambitieuse, les pieds bien sur terre et la tête bien faite, qui ne s’en laisse pas compter, ni par les hommes, surtout de pouvoir, ni par ses parents qui ont peur de leur ombre, ni par les situations, qui ne manquent pas. Elle est engagée dans la défense de la cause des étudiants ce qui, dans un pays où l’expression démocratique relève quelquefois de la poésie abstraite, vaut quelques problèmes... Elle fait d’ailleurs dans cet épisode un petit séjour en prison…

Bande dessinée : Aya de Youpougon, la meilleure comédie de l'année 2023

Il y a Albert, qui pense que son homosexualité a été comprise par ses parents, et qui se retrouve dans un camp « de rééducation » pour qu’il apprenne à « redevenir un homme ». Il y a Innocent, sans papiers vivant à Paris, gay lui aussi, en couple avec Sébastien, et qui envisage de faire un mariage blanc avec Sabine pour régulariser sa situation. Une situation fausse qui embarrasse son compagnon...

Il ya Bintou, actrice dans la télénovela « Gâteuse de foyer », livrée à la vindicte d’une population qui, dans la « vraie vie » pense qu’elle est effectivement une fille facile briseuse de ménages. Il y a Monsieur Sissoko, un peu au centre de cet album, dont le fils caché Grégoire est devenu le nouveau DRH de la Solibra, l’entreprise où Aya fait son stage...

Tous ces personnages, et bien d’autres tous merveilleusement typés, composent une comédie humaine d’une éminente qualité, que le dessin de Clément Oubrerie, sans esbrouffe, efficace, illustre avec subtilité.

Et puis il y a la langue, d’une musicalité rare, aux expressions éminemment poétiques et imagées, qui incarne parfaitement cette langue française appropriée par les Africains (l’Observatoire de la Francophonie estime à 447 millions le nombre de francophones en Afrique. Loin d’être étrange ou cryptique, elle donne à la langue française une couleur inédite, curieuse et amusante qui confère à mon sens à Aya de Yopougon le statut de « meilleure comédie de bande dessinée de l’année 2023."

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Code EAN : 9782075193108

Aya de Yopougon Gallimard BD ✍ Marguerite Abouet ✏️ Clément Oubrerie tout public Côte d’Ivoire
 
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4 Messages :
  • 900 000 lecteurs ? Ou 900 000 livres achetés tous tomes confondus ? (ce qui est très bien aussi même si ça fait moins de lecteurs)

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    • Répondu par Sergio Salma le 3 janvier à  12:47 :

      Je chipote après ce commentaire mais un livre ne peut-il pas être lu par plusieurs personnes ?! Et d’ailleurs qui dit que ce sont les mêmes qui ont acheté les différents tomes ? Et plus encore, sachant que le livre est un phénomène-cadeau , comment savoir qui a acheté et pour qui ? L’acheteur l’acheteuse
      n’est pas toujours le lecteur la lectrice. Y a aussi le cas de celui celle qui aime tellement qu’elle il offre le tome 1 à tout son entourage. Et on ne parlera pas des achats faits par ces prescripteurs particuliers que sont les écoles ou les bibliothèques, là un livre = des dizaines des centaines de lecteurs et trices.

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      • Répondu le 3 janvier à  14:43 :

        Aya est une excellente série dont le succès est mérité (pour autant qu’un succès puisse être plus ou moins mérité). Ce qu’on peut interroger ici c’est cette fréquente assertion très marketing, qui consiste souvent à additionner les ventes de tous les tomes d’une série pour clamer un chiffre considérable de "lecteurs". On peut douter que l’intégralité de Aya ait été lue par 900 000 personnes différentes. Autant de tomes lus, c’est possible et bravo aux auteurs. Quant à savoir combien de personnes lisent chaque exemplaire d’un livre ( BD ou pas) c’est une autre histoire.

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      • Répondu par Lena M. le 3 janvier à  19:13 :

        Une excellente série, j’avais lu les premiers à parution avec le plus grand intérêt. Marguerite Abouet et Clément Oubrerie étaient ensemble à l’époque, ai-je entendu dire. Ensuite carrières en solo avec plus ou moins de bonheur, avec d’autres acolytes. Sapin dessine moins bien qu’Oubrerie, la bio documentée de Picasso est moins amusante que la vie à Youpougon, quartier populaire d’Abidjan, il y manque la verve de Marguerite et ses dialogues très attachant !

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