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Décès du bédéiste malgache Alban Ramiandrisoa-Ratsivalaka

Par Christophe CASSIAU-HAURIE le 22 janvier 2024                      Lien  
Il était l’un des premiers auteurs africains publié aux Etats-Unis et le premier essayiste de la BD malgache. Devenu très discret dans le milieu de la bande dessinée depuis une quinzaine d’années, Alban Ramiandrisoa-Ratsivalaka (1963 - 2024) avait démarré très tôt sa carrière.

C’est en effet à 19 ans qu’il publie durant la coupe du monde de 1982 une BD de 24 pages sur le football, Nirina Mpanao Baolina (Nirina le footballeur) dans le quotidien Madagascar-matin. Cette même année, il publie une page dans la revue Fararano-Gazety : Maki, ilay babakoto (Maki, le babakoto) suivi l’année suivante, dans cette même revue, du démarrage de la série Hanta, avec une histoire de dix planches.

Mais Ramiandrisoa-Ratsivalaka est surtout l’auteur du premier essai africain sur la bande dessinée, Ny tantara an-tsary (La bande dessinée), édité par l’Office du Livre Malgache, écrit à l’occasion d’un colloque sur la BD Malgache où il était intervenu en tant qu’orateur.

De 1984 à 1989, il collabore à la revue Fararano-Gazety où il propose d’autres épisodes de Hanta ainsi que Tsiakanjo, une série humoristique.

Décès du bédéiste malgache Alban Ramiandrisoa-Ratsivalaka

Il représente cette même revue au jury du Concours « Aventures dans l’Océan indien » en 1984, premier grand concours de BD organisé dans le pays. De 1985 à 1987, il devient directeur Technique chez Colormad et édite chez eux une BD évangélique, Paska. En 1987, il fonde l’Association pour la Promotion de la Bande Dessinée et de l’Image, Soimanga, qu’il va présider jusqu’en 1997. En 1988, il sort Vato ambany riana, une BD historique en langue malgache sur la lutte de libération du peuple malgache, édité par le Ministère de la Culture et de l’Art Révolutionnaire.

Le lancement officiel de cette bande dessinée sera accompagné d’une exposition avec Soimanga intitulée Ny Tantara an Tsary, une vulgarisation des techniques BD, illustrée avec les planches de la BD.

Entre 1989 et 1991, Alban Ramiandrisoa-Ratsivalaka publie aux éditions Saint-Paul des BD biographiques religieuses sur Victoire Rasoamanarivo, Jacques Berthieu, Jacques Alberione (diffusé en Amérique du Nord sous le titre James Alberione, Hero for the Gospel). Il est également caricaturiste pour le bimensuel Marturia Vavolombelona de l’église protestante.

En 1990, à l’occasion des 3e Jeux des îles de l’océan Indien, il fait des strips quotidiens très populaires (dans la rubrique Somonga, qui veut dire « Blagues ») pour les quotidiens Imongo Vaovao puis Midi Madagasikara. Cette même année, il entame une collaboration avec la Société d’Eau et d’Électricité Malgache (Jirama) avec plusieurs albums de commande : Zavavindrano (litt. : la fille de l’eau), BD sur le traitement de l’eau (1990), Tsiakanjo, sur la sensibilisation à une utilisation rationnelle de l’eau et de l’électricité ; Aratra (litt. énergie), album sur la production d’électricité (1993).

En 1991-1992, il dessine l’album Ny lafiny tekinika amin’ny tantara an-tsary (Le côté technique de la bande dessinée) avec l’équipe de Soimanga. De 1992 à 1997, il collabore avec divers organismes dans le domaine de l’Information-Éducation-Communication (IEC), réalise plusieurs travaux d’illustration et de BD sur des thèmes très variés tels que la santé, l’éducation civique… De 1997 à 2002, Ramiandrisoa-Ratsivalaka travaille à plein-temps en tant que manager, dans des projets de santé de l’USAID (agence de coopération américaine) grâce à ses compétences en matière de PAO.

À cette époque, il crée Soimanga Studio de Dessin, avec d’anciens élèves du cours de dessin de l’association. Il gérera cette structure jusqu’en 2006. En 2000, il dessine, sur un scénario du Dr Edward Powe, Dan Aiki meets Duna the sorcerer qui sera publié aux États-Unis.

De 2002 jusqu’à son décès, il travaille comme consultant international en Information Education Communication & Arts Graphiques et forme plusieurs générations de dessinateurs africains qu’il spécialise dans la PAO.

Alban Ramiandrisoa-Ratsivalaka était issu d’une famille d’artistes.
Sa sœur, Laurence Ramiandrisoa Ralimihanta (décédée le 12 juillet 2023) était une pionnière parmi les dessinatrices de BD malgache et africaine. Dès le début des années 1980, elle a été publiée dans Fararano-Gazety (avec l’histoire Anjely sa devoly = Ange ou démon). Titulaire d’une maîtrise en droit, elle s’orienta par la suite vers le journalisme (à la Radio Nationale) tout en travaillant, comme son frère, dans le domaine de l’IEC, notamment au sein d’organisme internationaux et régionaux.

Son frère, Steve Mialy Ramiandrisoa a travaillé en tant qu’assistant d’Alban sur différents albums. Depuis 2005 il travaille en freelance en tant que dessinateur et animateur 2D/3D et collabore beaucoup avec des ONG et/ou des entreprises privées dans le domaine de la communication visuelle, la publicité, et l’IEC… [1]
Les trois Ramiandrisoa avaient comme projet de réaliser des séries télévisées sous forme de dessins animés. En 1995, ils ont réalisé une série de courts métrages en animatique avec les moyens du bord. Cette série consistait à donner vie à des contes traditionnels malagasy et s’intitulait : Ny aty aminay (ça se passe comme ça chez nous), produite et réalisée avec les dessinateurs de Soimanga. Elle avait été diffusée sur la chaîne nationale (TVM – Télévizionina Malagasy).

Récemment, ils projetaient de reprendre la série sous forme de dessins animés avec la technique et les moyens matériels nécessaires, mais le sort en a décidé autrement.

Si les débuts d’Alban, dans les années 1980, se situaient à l’époque de l’âge d’or de la BD malgache, il en restait plus de 40 ans après l’un des rares survivants encore actifs. À la différence de la plupart de ses collègues, il a su anticiper les changements qui ont bouleversé le milieu grâce à une capacité de rebond peu commune. Son farouche désir d’indépendance financière et professionnelle l’avait fait devenir chef d’entreprise et consultant externe pour différents organismes internationaux, sans pour autant cesser de produire et de se diversifier.
Un parcours hors du commun que la mort a interrompu trop tôt, à 60 ans à peine.

(par Christophe CASSIAU-HAURIE)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Pour en savoir plus sur cet auteur très peu connu en France, consultez cet entretien de 2011

[1Il obtenu une bourse d’étude qui lui a permis d’étudier à l’Académie des beaux-arts de Moscou et à l’institut cinématographique de l’URSS (VGIK), filière ANIMATION (1988 – 1991).

✏️ Alban Ramiandrisoa-Ratsivalaka Madagascar Décès 2024
 
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