Quelque part dans le nord du Dakota encore bien enneigé, le vieux Ambrosius Morgan occupe seul un ranch isolé loin de toute civilisation et persiste à élever du bétail.
En cette fin de XIXe siècle, l’Ouest voit « arriver la civilisation » symbolisée notamment par le chemin de fer, le télégraphe ou l’expansion des villes. La vie de cet « ours mal léché » bascule lorsqu’il reçoit la lettre d’une compagne qu’il a aimée des années auparavant lui apprenant qu’il est le père d’une jeune femme de vingt deux ans. Le vieux cow-boy se lance alors dans un long périple à la recherche de cette Liza Jane Curtis, disparue depuis son départ pour l’Arizona.
Ignorant s’il revient dans son vieux ranch, règle quelques affaires courantes avant de se lancer dans une expédition qui s’annonce pleine de rencontres plus ou moins insolites, parmi lesquelles celle d’un jeune papoose Apache qui non seulement accompagne Ambrosius dans son voyage mais aussi justifie le titre, à première vue énigmatique, de cet album.
Après le très remarqué Buffalo Runner paru chez Rue de Sèvres, l’auteur de Gorn (Vent d’Ouest) poursuit son retour au Western amorcé en janvier 2015. Après un détour par l’animation, l’ancien élève des Beaux-Arts d’Angoulême débute sa carrière chez Delcourt en 1990 avec les Enfants du Nil. Après avoir visité différents univers comme l’Heroïc Fantasy ou le médiéval-fantastique aussi bien comme scénariste que comme dessinateur, il revient à ses premières amours. Dans ce nouvel opus désormais publié sous le label Grand Angle de Bamboo, il nous invite à suivre l’itinéraire du vieux cow-boy dans une époque finissante.
Fort de sa profonde connaissance de la conquête de l’Ouest et de sa passion pour une BD d’aventure populaire, l’auteur profite de ce récit pour dresser le portrait d’un monde appelé à disparaître, l’arrivée d’une civilisation avec son cortège de règles, de contraintes dans lequel le protagoniste de Ghost Kid a du mal à se reconnaître. Ce retour au western se justifie aussi du point de vue de son auteur comme une manière de renouer avec une bande dessinée d’aventure, tout public, populaire et classique. Le long voyage du cow-boy solitaire fournit aussi l’occasion au dessinateur de s’attarder sur les paysages et les grands espaces caractéristiques particulièrement soignés.
La finesse et la précision du trait de Tiburce Oger rend ce récit haletant et dynamique tandis que son souci du détail y ajoute de la crédibilité. La reprise d’images en pleine page offre une opportunité supplémentaire d’apprécier le traitement des couleurs traitées à l’aquarelle donnant un ton et un éclairage bien singulier au climat de cette histoire.
Suite à une première version luxe éditée en noir et blanc au début de l’été, l’édition classique est désormais dans les bacs. Après L’Oiseau rare et Deux passantes dans la nuit, ce nouveau titre confirme les choix ambitieux et de qualité de la collection Grand Angle.
(par Patrice Gentilhomme)
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