Pas si fréquent de voir un grand nom du cinéma [1] se lancer dans le scénario de BD. Avec de double portrait, d’une ville déjà déchirée et en voie de séparation, et d’une famille qui paye cher la naissance d’un État, Yakin offre une fresque en tension permanente.
En cette année 1945, Jérusalem dépend encore des Anglais qui administrent la région, tandis que la France gère la Syrie et le Liban. Pour les Juifs, en attendant le vote de l’ONU, qui viendra en 1948, la lutte s’exprime soit par la politique, soit par les armes, en l’occurrence contre les Arabes d’un côté, l’armée Britannique de l’autre. Et chez les Halaby, on retrouve ces différences : frères, cousins, maris, femmes s’opposent et se rejettent parfois, tout en visant le même rêve : un pays.
Bien servi par le dessin dynamique de Bertozzi, qui a bien saisi le contexte et l’époque, Yakin choisit plutôt le drame familial que la saga politique et diplomatique. Il s’est d’ailleurs inspiré de sa propre famille, israélienne, pour écrire cette histoire, et d’une certaine manière rendre hommage à son père Moni [2].
En montrant une violence quasi-permanente, des écoles tenues par des prêtres aux guérillas urbaines, jusqu’à l’affrontement entre Juifs et pays arabes, Boaz Yakin évite de trop prendre parti. De quoi ouvrir ce Jérusalem à toutes les sensibilités de lecteurs.
(par David TAUGIS)
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