C’est la première fois que l’artiste Rocket Monkey est traduit en langue française. Pourtant, il n’est pas un nouveau venu dans l’industrie du Hentai : Primal est ainsi le troisième album de cet auteur.
Un album qui a été publié originellement en 2017 au Japon par l’éditeur Core Magazine. Là aussi, c’est la première fois que l’on voit arriver un manga érotique issu du catalogue de cet éditeur en langue française. Primal ne sera d’ailleurs pas cette année l’unique référence à provenir de ce catalogue : l’éditeur NihoNiba a récemment annoncé que l’album Reika, ma splendide Maid sortirait à l’occasion de la Rentrée.
L’accès au catalogue de Core Magazine a une condition : comme vous l’expliquait l’équipe éditoriale de NihoNiba durant la Japan Expo 2023, la publication des albums de cet éditeur nippon est soumise à une censure graphique obligatoire. L’éditeur NihoNiba a expliqué par la suite aux internautes que l’éditeur Core Magazine souhaitait, pour prévenir tout problème juridique au Japon, que toutes ses parutions à l’étranger conservent leur censure d’origine japonaise.
Il faudra donc désormais connaître la signification de la possible censure du logo NihoNiba : si la poitrine est barrée de deux croix roses, cela signifie que l’album respecte une censure graphique comme au Japon. Cette censure consiste à voir apparaître sur les pages en noir et blanc des barres noires sur les parties génitales des personnages, celles-ci étant recouvertes d’une mosaïque sur les pages en couleurs. Pour notre part, nous avons trouvé dans cet album la censure plutôt discrète : nous l’avons quelques fois remarquée et elle ne saccage pas l’œuvre de l’auteur.
Primal est un recueil de six histoires, dont une inaugurale et principale qui occupe près de la moitié de l’album. Cette histoire demande de présenter un plat traditionnel japonais : l’Oyakodon. Accompagné d’un bol de riz, ce plat nous propose de retrouver du poulet accompagné d’un œuf : c’est pour cette raison que le terme Oyakodon signifie littéralement « parent et enfant ». Industrie du Hentai oblige, vous voyiez peut-être déjà venir en quoi va consister la proposition de Rocket Monkey...
Dans cette histoire, on suit les déboires sentimentaux de Takeo qui vient de rompre avec sa petite amie. Cette rupture lui est visiblement difficile : sa voisine Tsukiko et sa fille Akane remarquent très vite son mal-être. Quelques années plus tôt, Takeo avait permis par sa bienveillance à ses voisines, qui venaient alors de s’installer, de surmonter la disparition récente de leur mari/père.
La mère et la fille ont, chacune de leur côté, une idée : pourquoi ne pas effacer le souvenir de cette ex qui tourmente Takeo grâce aux charmes d’une autre femme ? Sans crier gare, celui-ci va se retrouver à coucher avec la mère et sa fille qui souhaitent le réconforter, une situation qui le met progressivement mal à l’aise… Qu’arrivera t-il lorsque les deux femmes, qu’il estime beaucoup, connaîtront la relation qu’il entretient avec leur proche ? Une histoire portée par un drame sentimental léger que nous avons bien apprécié et qui donne une tonalité claire à l’album.
En effet, les autres histoires qui constituent la seconde moitié du recueil arpentent eux aussi la voie du Vanilla dans une atmosphère bon enfant. Ce que nous avons particulièrement apprécié dans la narration de Rocket Monkey, c’est qu’il prend le temps de poser un contexte et des enjeux dans chacune de ses histoires. Par exemple, l’intrigue qui nous a semblé la plus intéressante gravite autour du trouble érectile d’un personnage qui doute de l’amour que lui porte son amie d’enfance, estimant qu’elle est trop bien pour lui. Là où le bât blesse, c’est que la chute de ces histoires est expédiée en une page, ce qui tranche avec le riche propos introductif.
Sur le plan du contenu érotique, nous avons trouvé les fantaisies de Rocket Monkey plutôt salaces dans l’esprit : ce n’est pas pour rien que le mot-clé « Anal » se retrouve en quatrième de couverture pour caractériser l’album. L’auteur se montre résolument efficace dans ses propositions, mais celles-ci nous ont semblé parfois redondantes (notamment au fil des histoires de la seconde moitié de l’album).
Le joli trait de l’artiste sort du lot : au cours des ébats, on ressent le soin particulier apporté à la représentation de l’inertie et des masses des corps, notamment des personnages féminins. Rocket Monkey souligne volontiers dans ses planches les rondeurs de ces derniers, comme par exemple le petit ventre qui caractérise la voisine Tsukiko dans l’histoire principale. Les amateurs d’Ahegao [1] trouveront aussi leur compte avec cet album, même si on a eu l’impression que les visages des personnages féminins dessinés par l’artiste sont régulièrement ressemblants dans le feu de l’action.
Primal nous semble être une très bonne pioche de cet été : Rocket Monkey débarque en langue française et nous convainc par ses histoires bien racontées, mais aussi par son trait aux rondeurs bien prononcées. Si d’aventure nous croisons à nouveau le chemin de l’auteur ces prochains mois, c’est avec confiance que nous anticipons cette future rencontre.
(par Nickyl)
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Primal. Par Rocket Monkey (scénario et dessins). Traduction du studio Charon. NihoNiba. Sortie le 25 août 2023. 214 pages. 13,99 Euros.
[1] La représentation du visage d’un personnage, bien souvent exagérée, à l’acmé d’un ébat.
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