Ce n’est pas la première fois que François Ayroles nous gratifie de ses « Moments clés de l’histoire de la bande dessinée ». Il avait publié deux volumes sous les bannières du Neuvième Monde et des éditions Alain Baulet, mais surtout un délicieux « Moments clés de l’Association » paru chez cet éditeur.
À chaque fois, l’auteur égrène ses anecdotes, parfois bien connues mais parfois aussi totalement inconnues aux frontières du cryptique, avec un humour distancié que l’on pourrait croire parfois destiné aux seuls initiés.
Disons-le tout net : c’est un plaisir de voir comment il croque les auteurs parfois les plus obscurs de l’histoire du Journal de Spirou dressant une impressionnante galerie de portraits où l’on retrouve Franquin, Jijé, Delporte, Morris, Peyo, Tillieux, Roba… mais aussi des figures dont les visages sont quasiment inconnus des lecteurs : la famille des éditeurs Dupuis, le dessinateur Sirius ou mieux encore, Marcel Remacle, le dessinateur du Vieux Nick et Barbe noire qui a rarement paru en public.
On ne peut-être qu’impressionné, comme connaisseur, par l’importance de sa documentation et surtout par la justesse des portraits réalisés sans aucune charge excessive, avec élégance et raffinement.
Ayroles a le talent de l’historien qui sait figer en quelques instants une récit complexe aux multiples personnages couvrant 80 ans de l’histoire de la bande dessinée avec quelques anecdotes saillantes. C’est fait avec bonhomie, bienveillance et même sympathie. Mais surtout, et c’est là une des qualités majeures de cet ouvrage, les textes qui accompagnent ces 180 dessins d’ironie sont d’une parfaite précision, savamment recoupés aux bonnes sources, et offrent des schémas historiques d’interprétation aux angles rares et inédits. Rarement en effet, le chatoiement de l’anecdote avait servi avec autant de justesse la grande histoire de la bande dessinée franco-belge.
Ayroles est à nos yeux le plus talentueux historien de la bande dessinée qu’il nous ait été donné de lire depuis longtemps, une sorte de Jules Michelet de la BD, que nous sacrons sans vergogne le meilleur historien de la BD de l’année 2018.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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