2137. La surpopulation a entraîné de graves modifications de l’écosystème. La quasi-totalité des espèces animales et végétales a disparu, excepté dans une partie de l’Amazonie mise en quarantaine.
Dans ce dernier bastion du monde sauvage survivent, dans l’ignorance générale, d’anciens révolutionnaires surnommés les "éco-martyrs". Parmi eux, Kanopé, une orpheline débrouillarde tombe nez-à-nez avec un jeune homme qui s’échappe de la ville...
Le nom de famille de Louise Joor ne vous est peut-être pas inconnu, car c’est la fille du directeur éditorial de Delcourt. Vous pourriez dès lors douter des raisons objectives à la publication de son premier livre chez l’’éditeur au triangle rouge ! Mais la jeune femme déterminée nous ramène assez rapidement à la raison : "Depuis que je suis sorti de l’école (Saint-Luc à Bruxelles), j’ai envoyé toute une série de projets à bien des éditeurs francophones, nous explique-t-elle. Comme d’autres auteurs, j’ai essuyé quantité de refus pendant trois ans, avec parfois des remarques qui me faisaient progresser. Ainsi, Grégoire Seguin a toujours été intéressé par mon travail, mais il désirait que j’en améliore encore des aspects. C’est en lisant le dossier de "Kanopé" que lui et Guy Delcourt ont été conquis, et qu’ils ont décidé de passer outre le fait que je sois la fille d’un de leur collègue éditeur !"
Il faut avouer que ce one-shot de plus de cent vingt pages n’est pas conventionnel ! Toute la première partie est muette, alors qu’on tente de comprendre qui est l’héroïne Kanopé, comment elle appréhende la sauvage nature amazonienne, et quels liens l’unit aux différents animaux qu’elle rencontre (puma, bison, etc.). Ce n’est qu’après cette mystérieuse introduction que le dialogue peut commencer, par le biais de l’arrivée inopinée de Jean, un jeune hacker qui fuit les autorités. Tout oppose ce rejeton des villes et l’éco-martyr, mais au gré des aventures, des sentiments vont germer.
"Je voulais à la fois traiter de la rencontre, mais également de l’écologie, explique Louise Joor. Montrer une nature belle et abondante mais menacée par une société futuriste complètement déconnectée du vivant. Les éco-martyrs, par exemple, sont un résultat de cette société. J’ai imaginé des hommes qui rejettent le lien qu’ils ont avec leur monde et placent leur vie dans les mains de cette nature qui se fait rare. Kanopé, mon héroïne, n’est pas une éco-martyr mais a hérité de leur vision respectueuse et est très attentive aux signes que lui renvoie son environnement, c’est d’ailleurs pour cela que se tisse une relation forte entre elle et le bison, dans lequel elle trouve un reflet de sa propre solitude. C’est une démarche parallèle entre Jean et Kanopé : ils apprennent tous deux des choses sur le monde qui les entoure, et donc également sur eux-mêmes. Avec ce récit d’anticipation, je désirais avant tout que le lecteur passe un bon moment. Si un message complémentaire le touche, tant mieux, mais cela doit rester avant tout un divertissement."
Kanopé traite donc de la solitude, de l’amour, de la confiance, de la relation et la construction qui se met en place pour aboutir à tout cela. C’est aussi un livre enrichissant sur le futur, une anticipation qui part bien entendu d’un point de vue radical, mais qui propose des pistes innovantes et intéressantes. Dès que la lecture est entamée, il est difficile de s’en arracher avant la fin...
(par Charles-Louis Detournay)
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