Nous l’avions croisé fatigué lors du Festival d’Angoulême 2010, mais ému par l’accueil que lui avait réservé le public lors d’une rencontre internationale qui lui avait redonné le goût et l’envie de se remettre sur son Philémon inachevé. Fred avait même appris de la bouche du maire que la nouvelle médiathèque allait prendre le nom du A, bel hommage à sa série culte.
Pour l’édition 2011 du Festival, changement d’ambiance. Fred était apparu sur la scène du théâtre d’Angoulême lors de la remise des récompenses. Fringant et facétieux, il avait donné le Prix Révélation à Élodie Durand et Ulli Lust en jouant avec beaucoup d’autodérision le vieux grand-père un peu sourdingue, se permettant en lisant le carton trop vite de délivrer le prix à Hergé avant de se reprendre avec un petit sourire en coin.
Et hier soir à Paris, il était bien présent à la galerie Martel pour le vernissage de l’exposition qui lui est consacrée jusqu’au 23 avril. Qu’on se le dise, à 80 printemps, Aristidès Othon Frédéric Wilfrid [1] est toujours sur le pont ! En passant, bon anniversaire, avec un jour d’avance.
Il serait donc bien dommage de ne pas rendre hommage à son talent en allant flâner rue Martel pour examiner de plus près tous ces originaux. D’autant plus que cette expo-vente dresse un véritable panorama de la carrière de ce maître de l’absurde, des années 50 jusqu’à la fin des années 90.
Si Philémon reste la série-phare de l’auteur à l’éternelle moustache, l’exposition permet de découvrir ou redécouvrir les différentes publications qui ont jalonné son parcours. Le Petit Cirque (1973), L’Histoire du Magic Palace Hôtel (1980), Cythère, l’apprentie sorcière (1980), Hum (1982), Le Journal de Jules Renard (1988), L’Histoire du Corbac aux baskets (1993) qui reçut le Prix du meilleur album à Angoulême en 1994, des illustrations des Diaboliques et du Rideau cramoisi de Barbey d’Aurevilly, Le Noir, la couleur et lavis (1997). Mais aussi des couvertures d’Hara Kiri, dont Fred fut l’un des fondateurs avec Cavanna et le professeur Choron, et des livres-disques lus et chantés par Jacques Dutronc [2].
O tempora, o mores... Au début de la publication de Philémon, le journal Pilote recevait des lettres de lecteurs qui écrivaient : "Qu’est-ce que c’est que ce dessinateur ? Mon fils de trois ans en fait autant !" Et il fallut tout l’acharnement de René Goscinny pour l’imposer dans les pages du magazine. Suivirent 15 tomes des aventures de Philémon et autant d’autres one-shots. Un bonheur.
Et pour fêter dignement l’anniversaire de Monsieur Aristidès, parallèlement à l’exposition de la galerie Martel, Dargaud publie une monographie et l’intégrale en trois volumes des albums de Philémon. Un tir groupé pour réveiller la mémoire de certains et éveiller l’intérêt des plus jeunes. Auquel nous ajouterons dans quelques jours un interview du vieux sage.
(par Thierry Lemaire)
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Images (c) Thierry Lemaire
Exposition jusqu’au 23 avril, Galerie Martel, 17 rue Martel, Paris 10ème.
[1] Le nom exact de Fred est Othon Aristidès mais le personnage qui lui ressemble étrangement dans les Rubrique-à-brac a été baptisé ainsi par Gotlib.
[2] Fred a en outre, mais oui, écrit quelques chansons pour le chanteur.
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