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MeTooBD, ActuaBD et l’affaire Florent Ruppert

Par Charles-Louis Detournay le 9 mai 2023                      Lien  
À la suite d’une enquête et une interview réalisées par Ellen Salvi pour Mediapart concernant les faits de violences sexuelles et sexistes reprochés à Florent Ruppert, notre article de vendredi dernier a déclenché bon nombre de réactions sur les réseaux sociaux. C’est pourquoi nous y revenons aujourd’hui.

Jeudi 4 mai en fin de journée, Mediapart publie un dossier signé par la journaliste Ellen Salvi et intitulé « #MeTooBD : l’auteur Florent Ruppert est mis en cause par plusieurs femmes  ». Des faits graves sont exprimés par plusieurs femmes, qui témoignent dans le cadre d’une enquête équilibrée puisque le mis en cause a eu la possibilité, face à ces témoignages, de s’expliquer. Il nie tout en bloc. Cette affaire intervient après la récente condamnation de Jean-Michel Arroyo en février dernier pour des faits de violences faites aux femmes.

Pour être tout à fait clair, nous condamnons fermement toute forme de violence (physique, psychologique, sexuelle) et nous saluons le courage des victimes sollicitées par Mediapart qui osent prendre la parole. Leurs témoignages mettent en évidence des comportements condamnables qui doivent être portés devant la justice, permettent à d’autres victimes d’également se manifester et contribuent à faire évoluer notre société de manière générale, ainsi que le monde de la bande dessinée en particulier. En n’exprimant pas d’emblée notre compassion envers les victimes et leurs souffrances, notre précédent article omettait donc des points que nous jugeons importants. Nous présentons nos excuses à toutes les personnes que ce contenu a choqué.

MeTooBD, ActuaBD et l'affaire Florent Ruppert
L’article d’ActuaBD du 5 mai 2023

Impossible pour ActuaBD de passer cela sous silence, sans pour autant se départir d’un regard critique posé sur le travail réalisé par nos confrères, y compris sur l’entretien à teneur historique publié conjointement à l’enquête de Mediapart. Et c’est sans doute cette synthèse entre l’exposition des faits et le témoignage d’un historien, opérée par Didier Pasamonik dans son article, qui a participé à heurter certains lecteurs.

Au sein de notre rédaction s’est instauré un vif débat autour de cet article. En effet, chacun de nos articles est signé par son auteur, ici Didier Pasamonik, dont les propos n’engagent pas les autres membres de la rédaction. Cet article a été soumis aux membres du comité de rédaction, composé de bénévoles qui n’ont pas eu l’occasion de réagir avant sa publication. Mais ce qui est fait, est fait. Ce débat interne débouchera certainement sur de prochains articles indépendants ou conjoints qui affirmeront d’autres points de vue sur ce dossier, et de manière générale sur le mouvement #MeToo au sein de la bande dessinée.

Ces prochains articles se rejoindront autour de la ligne éditoriale d’ActuaBD : informer et se positionner, parfois de manière tranchée, mais toujours dans le respect des personnes, et dans l’expression de notre soutien indéfectible aux victimes de violences sexuelles et sexistes.

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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3 Messages :
  • MeTooBD, ActuaBD et l’affaire Florent Ruppert
    10 mai 2023 09:22, par Ced350

    Beaucoup de bruit pour rien pour paraphraser un titre du théâtre de Shakespeare...

    La considération et l’écoute des victimes de violences sexuelles et sexistes, ou non, est nécessaire.

    Mais on peut s’interroger sur cette vague populiste et le défouloir sur réseaux sociaux qu’elle permet ; dans la binarité des idéologies sans frein les méthodes sont similaires, et elles sont violentes et injustes.

    Est-ce que la finalité de ce cirque est la seule prévention de ces violences sexuelles et sexistes dans le milieu de la bande dessinée, d’en faire un milieu plus ouvert aux minorités ? Ou n’est-ce pas aussi l’avancée d’une normalisation puritaine mondiale, car promue et véhiculée par des WASP, des descendants de protestants anglo-saxons ? Cette question n’est pas en carton, car elle affecte durement nos rapports culturels aux images (de bandes dessinées), et aussi à nos propres corps.

    Je pense à M le maudit de Fritz Lang qui déroule tout des défauts du tribunal populaire plutôt que judiciaire, même pour un coupable qui doit être condamné.

    Ces contorsions infinies sont pathétiques et disent quelque chose des difficultés éthiques que ces idéologies provoquent.

    L’article de Didier Pasamonik tentait d’élargir les questions que soulèvent cette affaire, plutôt que de se borner à relayer des informations qui relèvent du fait divers, est-ce que c’est cela qu’on lui reproche ?

    Répondre à ce message

  • MeTooBD, ActuaBD et l’affaire Florent Ruppert
    15 mai 2023 06:59, par Claude Gendrot

    Didier Pasamonik, directeur de la rédaction d’ActuaBD, a réagi à l’enquête de Mediapart concernant Florent Ruppert, accusé par plusieurs femmes d’agressions sexuelles et de viol. J’ai toujours eu avec Didier Pasamonik des relations cordiales. J’ai toujours lu ses articles avec intérêt, et mes désaccords éventuels ne dépassaient pas le stade de la contradiction bien comprise dans le débat sans cesse renouvelé sur la bande dessinée. Cette fois, j’avoue avoir été sidéré par la lecture de son article daté du 5 mai dernier. J’avais commencé à écrire cette tribune quand est tombée la mise au point de la rédaction d’ActuaBD concernant le papier de son directeur. Pour salutaire qu’elle soit, cette mise au point ne m’a paru en rien devoir modifier la teneur de mes propos.

    « C’est violent », écrit d’emblée Didier Pasamonik. C’est violent, en effet, qu’un homme puisse être un agresseur sexuel et un violeur. Mais, selon Pasamonik, ce qui est violent, c’est qu’un auteur dont sont appréciées « l’intelligence et l’inventivité » soit « sur le banc des accusés ». Et, jetant dans le même sac les livres pédopornographiques de Vivès et les violences sexistes dénoncées de Ruppert, ce qui est « criminel », ce n’est pas la conduite d’un homme accusé d’agressions sexuelles et de viol, mais l’accusation de « pousse au crime » contre la bande dessinée dont la lecture serait responsable de comportements délictueux. Le reste de l’article est une manière de noyer le poisson, où l’on a du mal à suivre le fil du raisonnement : en quoi, par exemple, Ruppert serait-il la « véritable cible » de « l’affaire Vivès » ?

    Bien sûr, Florent Ruppert, comme tout mis en cause, est présumé innocent. Mais en attendant l’éventuelle « qualification criminelle » des agissements de Ruppert, gentiment présenté comme un « dessinateur fêtard aux pratiques apparemment libertines », nous devons affirmer, avant toute chose, que la parole des femmes doit être entendue, que leur écoute est une nécessité absolue, que le faisceau convergent de leurs témoignages doit être pris au sérieux. Au lieu de quoi, dans un gloubi-boulga qui mêle l’abbé Bethléem et Georges Sadoul, le régime de Vichy et Ah ! Nana !, pas un mot dans l’article, ne serait-ce que de compassion, pour les victimes ! Elles sont ignorées. Pis, elles sont niées : à aucun moment, sauf une seule fois dans le chapô pour signaler que Mediapart a recueilli leurs témoignages, il est question des femmes.

    Au-delà de Didier Pasamonik, trop de voix masculines sont aphones, ou, quand elles ne le sont pas, font entendre la même récurrente et sale chanson du patriarcat. Il est plus que temps de dire haut et clair que la voix des hommes doit s’allier à celle des femmes.

    Claude Gendrot,
    Éditeur.

    Répondre à ce message

    • Répondu le 15 mai 2023 à  14:05 :

      Totalement d’accord, M. Pasamonik s’est exprimé de façon maladroite. L’important n’est pas le trouble que peuvent ressentir les journalistes comme lui et ceux et celles qui ont cotoyé Ruppert. L’important est que justice soit rendue aux victimes et que Ruppert soit condamné s’il est coupable. Il faut écouter la parole des femmes victimes et pour qu’elles soient reconnues comme victimes, il faut qu’elles portent plainte et que la justice soit saisie et se prononce en ce sens.

      Répondre à ce message

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