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Record de la production BD en France en 2003 : 1730 albums publiés (+15.9%).

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 22 décembre 2003                      Lien  
L'enquête annuelle de Gilles Ratier, secrétaire de l'Association des critiques de bande dessinée (ACBD) est toujours un moment attendu. Ce comptable de la production BD donne chaque année la tendance du marché en terme de production.

Selon Gilles Ratier, dont l’enquête est téléchargeable ci-dessous en format PDF, cette année, la production des albums de BD proprement dits a été de 1.730 nouveautés (contre 1.494 l’an dernier) et 515 rééditions. Avec les autres ouvrages (illustrations, études sur le BD), cela fait un total de 2.526 titres publiés contre 2.204 l’année précédente répartis sur 185 maisons d’édition. Notons cependant que 80% des ventes se concentrent chez les 26 premiers éditeurs.

Grosse progression des mangas

Parmi ceux-ci 521 BD japonaises ou coréennes contre 377 l’an dernier, soit une augmentation de la production de 38% pour les mangas qui dépassent aujourd’hui les 30% du marché français ! Année record aussi pour la BD américaine avec 142 albums publiés.
Dans l’hexagone, le premier vendeur est sans conteste Titeuf publié chez Glénat, même si on ne lui compte pas de nouveauté cette année. La plus grosse vente de l’année est cependant, et ce n’est pas une surprise, Astérix et la Rentrée gauloise (1.500.000 exemplaires mis en place en septembre) pour un titre qui est qualifié par Gilles ratier de "fausse nouveauté"

Les best-sellers ? Des classiques !

Derrière ces deux intouchables, la liste des nest-sellers de l’année est quasi exclusivement constituée de classiques : le nouveau "Blake et Mortimer" (600.000 de mise en place), le dernier "Petit Spirou" (590.000), "Joe Bar Team" (530.000), "32 décembre" de Bilal (425.000), "Boule et Bill" (400.000), "Le Chat" de Geluck, "Lanfeust de Troy" et "Cédric" (300.000 exemplaires chacun), "Le cri du peuple" de Tardi (135.000 exemplaires. Ces chiffres sont fournis par les éditeurs et ne traduisent pas les ventes nettes car la plupart de ces ouvrages subissent des retours qui interviennent l’année suivante, mais ils marquent la tendance.

Consécration ?

« C’est l’année de la consécration », nous dit Gilles Ratier, pour un métier qui « attire de plus en plus de femmes : 1264 dessinateurs ou scénaristes (dont 93 femmes, soit 7,35%) ». On veut bien partager son enthousiasme pour ce timide retour à la parité, mais nous dirions que c’est plutôt un année d’inquiétude pour l’avenir car le succès des mangas, devenu aujourd’hui « un secteur clé » (dixit Guy Delcourt), constitue, selon Jean Deneusmostier, administrateur des éditions Dupuis, une évolution lourde de menaces. Il lance ce cri d’alarme dans L’Année de la BD (éditions Soleil, à paraître début janvier) : « Devons-nous contribuer à favoriser un genre qui pourrait affaiblir la BD traditionnelle (les rayons ne sont pas extensibles) dont la production ne nous appartient pas en propre (ce sont des licences), un genre où nous ne créons rien ? ».Inquiétude aussi dans les exploitations dérivées au cinéma, comme nous l’exprimions dans un précédent article
Plus qu’une année de « consécration », c’est d’une année charnière qu’il s’agit que cache mal une présence accrue de la BD dans le marché du livre (13%) car elle porte en elle la possible faillite du modèle franco-belge face à ses compétiteurs américains et japonais.

Record de la production BD en France en 2003 : 1730 albums publiés (+15.9%).

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Illustration : Astérix reste le best-seller toutes catégories en 2003. © Albert René.

 
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6 Messages :
  • Cher Didier,
    J’ai lu avec attention et intérêt ton analyse de mon rapport sur l’année 2003 de la BD. Pour atténuer tes conclusions tout à fait personnelles, je voudrais préciser que j’ai voulu décrire l’état des lieux du média BD (dans son ensemble) pendant toute l’année 2003 et que le résultat est plus qu’une simple enquête reflétant l’état d’esprit de quelques éditeurs à un moment précis. Je persiste et je signe, si l’on tient compte de tous les paramètres, 2003 est, pour la BD, l’année de la consécration. Malgré un climat économique défavorable, l’absence de véritables locomotives (pas de nouveau « Titeuf » et pas de « vrai » nouveau « Astérix ») et les résultats décevants obtenus par « Michel Vaillant » ou « L’outremangeur » au cinéma, les ventes de BD sur le territoire francophone européen ont progressé et les contrats concernant les adaptations de BD pour le 7ème art n’ont pas arrêté de se signer et se sont même multiplié. Certes, la montée des mangas est évidente, mais à lire ton article, on pourrait croire que tu considères que ce n’est pas de la BD : cela m’étonnerait de la part du fin observateur du milieu que tu es ! Quand on regarde les chiffres de plus près, on s’aperçoit que les plus grosses ventes des mangas se situent entre 20 000 et 35 000 ex. (à l’exception du phénomène « Yu-Gi-Oh ») : on est loin des 600 000 de « Blake et Mortimer » et des chiffres de tirage des autres classiques franco-belges ! En plus, outre les 20 titres cités dans mon rapport, il faut savoir que les autres mangas tirent difficilement à 10 000 ex. alors que c’est un chiffre facilement accessible pour du franco-belge ! L’augmentation des parts de marché pris par les mangas ne s’explique que par la multiplication des titres dont chaque tome se succède dans des délais très rapprochés. Si tu as lu ma conclusion, tu sais que je n’occulte pas les problèmes qui noircissent un tableau assez optimiste dans l’ensemble. Pour moi, c’est 2004 qui risque être une année charnière (et non 2003 !) : les éditeurs sauront-ils prendre les mesures nécessaires pour éviter les écueils qui se dressent à l’horizon ? Certains ont commencé mais tout ne se fait pas en un jour : il faut le temps au temps ! C’est la même chose en ce qui concerne le timide retour du sexe féminin dans les métiers de la BD ; ceci dit, mea culpa, j’aurais du mieux m’expliquer quand j’annonce que le milieu se féminise. J’aurais dû préciser qu’il y a encore quelques années les dessinatrices se comptaient sur les doigts de la main et que si les femmes étaient présentes comme scénaristes (voir à ce sujet mon ouvrage « Avant la case ») c’était souvent de façon anonyme ou comme bouche-trou pour justifier de leur participation à la rédaction de tel ou tel hebdomadaire. Aujourd’hui, le mouvement est en marche et les métiers de la BD sont en train de s’ouvrir largement aux femmes (même si, je te l’accorde, on n’est encore loin de la parité). C’est vrai que je suis confiant et enthousiaste car la BD a encore de beaux jours devant elle : elle est beaucoup plus segmentée qu’auparavant et elle fait désormais entièrement partie du paysage ; si quelques difficultés sont encore à craindre (il y aura certainement pas mal de restructurations), nous ne sommes absolument plus (contrairement à ce qui a été écrit dans un récent article de Bo Doï) dans le même contexte que celui des années 1980 où la crise a sévi : la BD est enfin passée à l’âge adulte (dans tous les sens du terme) mais elle garde toute son impertinence et sa jeunesse d’esprit !
    Amicalement

    Gilles Ratier
    Secrétaire Général de l’ACBD
    (Association des Critiques et journalistes de Bandes Dessinées)

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    • Répondu le 23 décembre 2003 à  19:14 :

      Cher Gilles,

      A chacun son enquête. Personnellement, je n’ai pas fait parler les chiffres, j’ai fait parler les gens, notamment le patron de Dupuis qui s’inquiète légitimement. Tes propres analyses paraîtront aux côtés des miennes, cher collègue, dans "L’Année de la BD" (éditions Soleil) en kiosque et en librairie spécialisée début janvier.

      On ne va pas infliger aux lecteurs un débat de spécialistes.

      Le fait qui me semble clair, c’est que la progression du marché cette année est due principalement à l’explosion de la consommation des mangas et des comics et c’est ce que dit mon article.

      S’il y a une "consécration" , c’est bien celle des mangas, ce qui ne m’inquiète pas plus que cela comme amateur de BD (où as-tu été chercher que je ne classais pas les mangas dans ce genre ?), mais cela doit interpeller plus d’un de nos lecteurs qu’il soit quidam, dessinateur ou professionnel de l’édition ou de la librairie.

      C’est mon rôle de journaliste d’ouvrir le débat.

      A vous, lecteurs, de donner votre sentiment sur la question.

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    • Répondu par Jeff le 25 décembre 2003 à  02:23 :

      moi je remarque juste une chose : si la bd franco-belge s’ouvre parfaitement -et ce depuis quelques années- à la bd US et orientale dans un souci de brassage des cultures, on ne peut pas dire que la réciprocité soit forcément de mise : je serais curieux de voir au Japon et aux USA quel est le pourcentage de BD franco-belges publiées par rapport à la production locale....)
      voilà c’est en quelque sorte un constat plutôt amer...
      un sentiment qu’on se fait avoir, quelque part, non ?

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      • Répondu par Laurent Melikian le 26 décembre 2003 à  21:23 :

        Faut-il toujours exiger une réciprocité ? Nos BD s’exportent bien au Portugal ou en Allemagne ou au Danemark. Y a-t-il pour autant réciprocité ? Et que dire simplement du Québec ?
        Notre type de publication cartonné couleur ne correspond pas aux attentes du grand public US ou Japonais qui souhaite un produit plus consommable. Cela changera peut-être un jour ou peut-être pas. A moins que d’ici là nous aussi produisions du petit format noir et blanc au long cours. Après tout cela avait plutôt bien réussi à Baru.

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    • Répondu par Jeff le 27 décembre 2003 à  14:35 :

      L Mélikian a dit "Notre type de publication cartonné couleur ne correspond pas aux attentes du grand public US ou Japonais qui souhaite un produit plus consommable"

      là en quelque sorte, vous donnez un alibi à ce qui pour moi ressemble à un protectionnisme culturel. Ce n’est pas nouveau pour les USA, vous le savez bien.

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    • Répondu par JOE PHILIPPE le 2 juin 2004 à  17:52 :

      Comment vous prévoyez l’avenir de la BD ?
      -Est-ce que les techniques Marketing et Advertising sont bien appliquées dans la promotion de la BD ? Quels sont les obstacles qui empêchent une meilleure publicité de la BD ?
      - Est-ce que l’éditeur joue un rôle dans le succès des albums ?
      - - Quels sont les avantages et inconvénients des différents points de vente de la BD ?
      - - Quelle est la valeur ajoutée de la vente de la BD par Internet ?
      - - Est-ce que les petits auteurs et les petites maisons d’édition ont de la place pour publier leurs produits dans les différents points de vente de la BD ?
      - - Pourquoi les grands éditeurs ne vendent pas sur le net ? > - A votre avis, y at-il un manque de coopération entre les différents sites de la BD ?
      - - Pourquoi les frais de livraison sont chers, quel est le moyen de diminuer ces coûts ou même les éliminer ?
      - - Quelle est, d’après vous, la meilleure façon d’améliorer la vente de la BD, et est ce que l’Internet pourra y fournir une solution ?
      - - Quel est le pourcentage de votre budget annuel que vous accordez pour la publicité des albums sur Internet ?
      - - Est ce que les prix de la BD sont contrôlés, si oui par qui ?
      - - Vos recommandations pour une meilleure vente de la BD sur Internet.

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      • Répondu par sam le 21 novembre 2004 à  17:23 :

        bonjour pouriez vous répondre à cette question :
        est ce que les prix de la BD sont contrôlé, si oui par qui ?
        merci par avance

        Répondre à ce message

  • 1.730 nouveautés c’est bien. Mais combien de séries lancées cette année verront un 2eme tome ? Un coup d’oeil rétrospectif sur 2001 et 2002 serait surement très interessant.
    Attention à la comparaison entre les 764 albums publiés en 2003 par les "grands éditeurs" contre 843 en 2002. Les albums érotiques semblent être comptabilisés sur 2002 mais pas sur 2003.
    Ceci dit moins de nouveautés et plus de rééditions pour les "grands éditeurs", cela ne me semble pas être bon signe pour eux car les rééditions n’enrichissent pas le catalogue. Mais là encore il faut voir l’évolution sur plusieurs années.
    2003 une bonne année ? au vue des chiffres c’est probable. Année de la consécration ? J’en suis moins sûr.

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