New-York, les années soixante-dix. Un jeune garçon se prostitue avec des cadres dynamiques, des hommes installés dans leur vie, pour manger et simplement continuer à vivre. Il fréquente les déshérités de la société qui l’a renié et conduit là. Un jeune homme lutte contre la maladie et se révolte contre l’hypocrisie. Un combat pour la vie puis une lutte à mort pour survivre.
Des souvenirs dictés au terme d’un passage dans la vie. Un portrait en marge, un voyage du côté des vagabonds. Récit d’un road trip à perpétuité à travers la caducité d’un monde.
Wojnarowicz et ses deux acolytes choisissent l’explosion radicale dans le texte, le dessin, les couleurs pour faire ressurgir celle qu’elle a été dans la vie d’un héros « lost in the city ». Une existence à la Don Quichotte défavorisé mais les moulins ne tomberont pas, leurs pales sont trop fortes et repoussent toutes tentatives d’espoir.
Au travers le récit fantasmé, passent les décors d’une existence menée contre l’injuste. En révolte contre les représentants d’une société de la peur qui veut le repousser au plus loin, plus profondément encore. L’activiste de l’East Village entame sans choix une vie radicale.
La beauté de l’album, même pour qui ne connaît pas la fin tragique, tient dans sa façon de nous conduire au terme d’une route qui ne peut être qu’une impasse. La découverte de la mort prochaine n’empêche pas de conduire le chemin qui y mène. On assiste comme aspiré à un conte qui nous emmène à la rencontre d’un monde de perpétuel agonie, du crime pour la vie. Rien n’est épargné et la prose magnifique nous soumet à l’inquiétude du futur trépassé qui connaît son heure. À la limite de la perdition et de sombrer dans le néant.
Ce roman graphique publié par les éditions Laurence Viallet et Çà et Là quinze ans après sa publication posthume aux États-Unis est l’unique incursion de David Wojnarowicz dans l’univers de la Bande Dessinée. Servie et terminée après sa mort par James Romberger et Marguerite Van Cook, dessinateur et coloriste. Un album au dessin surréaliste et aux couleurs foudroyantes pour éclairer des zones d’ombre perdues pour la lucidité.
(par Vincent GAUTHIER)
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