Voici un an, elle faisait une expo en commun à la Galerie Huberty-Breyne avec son époux François Avril où sa délicate palette colorée se déclinait dans des paysages urbains qui faisaient écho à ceux de son mari. Un dialogue charmant, musical pour ainsi dire, les traits fluide de Dominique répondant aux variations plus cérébrales de François.
Après son diplôme de l’École nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d’art, Dominique Corbasson avait commencé comme styliste dans une grande maison de mode où elle faisait des croquis d’ambiance ou des sujets pour des foulards. Puis, elle travailla en indépendante pour les sociétés de textile réalisant des maquettes pour des imprimés de tissus d’ameublement, de lingerie ou de vêtements pour enfants. Mais bientôt l’illustration l’attire et elle pousse les portes de la rédaction du Cosmopolitan qui lui publie ses premiers dessins.
Une carrière internationale
Elle prend ensuite un agent (Tiphaine Illustration) et multiplie les travaux pour la presse (Figaroscope, Figaro Madame, Cosmopolitan, Vanity Fair, Psychologies magazine, Bayard Presse, Maison Magazine, Muze, Vivre Côté Paris...).
Envoyant sa carte de vœux à l’agent de François Avril au Japon qui ignorait qu’elle était son épouse, elle est prise « à l’essai » et c’est le succès. Elle croule très vite sous une multitude de demandes d’illustrations, surtout dans le secteur de la mode japonaise. Son nom devient une référence là-bas, couvrant des grandes campagnes qui se déclinent à toutes les saisons. On lui commande des dessins pour des accessoires, des foulards, des assiettes… « On a gagné plein de sous et cela nous a permis d’aller souvent au Japon » racontait-elle joyeusement.
Cette relation avec le pays du Soleil Levant ne s’arrêta pas, François Avril y travaillant également : on l’a vu concevoir des habits pour les poupées Blythe !, tandis qu’un autre agent lui permet de rebondir aux États-Unis et de voir ses dessins publiés dans Vanity Fair ou dans des publicités pour Tiffany…
Un style immédiatement reconnaissable
« Mon dessin est sans trait, nous expliquait-elle. Celui qui m’a inspiré à mes débuts, c’est Raoul Dufy parce qu’il pouvait faire des arbres bleus ou jaunes, le trait changeait de couleur… Mes lumières, je les ai un peu chopées chez Bram Van Velde où les couleurs sont mises les unes à côté des autres mais où il y a toujours du blanc qui circule, ce qui donne de la lumière au dessin. J’aime ce genre de dessins aérés où les couleurs ne sont pas « salies ». Elles sont juxtaposées mais pas mélangées, ce sont des « vraies couleurs », il faut que ce soit lumineux, frais... »
Il y a dans son dessin un jeu sur le fluide, voire le flou. « Il y a différentes écritures dans mes dessins, analysait-elle. Des fois il y a des choses qui sont en masse, compactes, qui se posent comme des taches architecturales. Après, je « tricote », je reviens avec des choses plus fines, j’affine, je reprends parfois même au crayon de couleur pour avoir des traits très fins. La peinture m’a amené à travailler sur des plus grands formats, avec une plus grande liberté dans les thèmes. Je suis très instinctive. »
Elle avait publié un livre, Joli Paris (Ed. Milan) où elle mettait en lumière le Paris qu’elle aimait : « Il y a toujours quelque chose à découvrir : l’architecture, les proportions des fenêtres, des portes, des jolies cours, des jardins… Je ne cherche pas à dessiner des choses oppressantes, angoissantes. Je dessine des choses qui me font plaisir. Il faut que cela ait l’air facile… »
En 2009, elle publie sa première et seule bande dessinée, Les Sœurs Corbi (Gallimard BD) où deux Miss Marple jumelles aux airs d’ingénues partent enquêter sur une série de meurtres dans le 16e arrondissement de Paris. Elle luttait contre la maladie depuis des années, avec un courage indescriptible. Ses dessins aux thématiques universelles et intemporelles lui assurent l’éternité.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Participez à la discussion