« PLOP ! » : quelque chose a dû tomber, mais quoi ? Le bruit, imperceptible pour les autres, provoque chez l’homme qui en est la victime de profonds maux de ventre qui, immanquablement, le conduisent aux toilettes. C’est ce qui arrive à Alex, tranquillement installé dans son canapé en train de regarder, avec ses potes, la finale du championnat de hockey. Surprise au petit coin : son viril pénis a disparu ; et à la place, une vulve est apparue. En rentrant chez lui, après quelques recherches, Alex apprend qu’il n’est pas le seul touché par cet étrange phénomène. Il entre en contact avec une journaliste, Emma, qui enquête déjà sur le sujet.
Voilà le point de départ d’une histoire qui, sous ses airs potaches et simplistes, interroge sérieusement les rôles genrés dans nos sociétés, les rapports de domination, et l’identité que l’on projette sur soi-même et sur les autres selon son appartenance de sexe. Parmi les hommes touchés par ce que certains d’entre eux voient comme un mal, se dessine une palette de réactions : honte, crainte, repli sur soi. Alex, quant à lui, passée la sidération des premiers jours, s’interroge sur sa sexualité. Mais il ne semble pas paniquer outre mesure, et a même plutôt l’air de tirer parti de la situation. Sexuellement femme, il se féminise socialement : changement d’apparence, épilation, nouvelle garde-robe... Il prend également conscience de ce que constitue le quotidien d’une femme en se prenant une première main aux fesses, de la part d’un de ses amis qui ne l’avait pas reconnu. Pendant que des politiques agitent le spectre de la fin du monde, d’autres réfléchissent à en inventer un nouveau.
Le scénariste, Sébastien Fleuret, est géographe de la santé et directeur de recherche au CNRS. Dans le cadre de ses travaux, il a lu une abondante littérature scientifique dans laquelle il a trouvé des articles relatifs à des poissons du fleuve Potomac qui changent de sexe au cours de leur vie. Après avoir songé à en faire un roman, Fleuret s’est tourné vers l’atelier de bande dessinée Kawa, en Anjou, où il rencontre Simon Vergnol. Celui-ci, à l’aide de sa tablette, illustre son premier roman graphique, dans un style qui n’est pas sans rappeler celui de David Snug, très expressif, aux formes parfois disproportionnées, et se singularisant ainsi de ce qui est habituellement proposé chez Steinkis.
(par Damien Boone)
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