Afin de connaître son destin, le jeune Alcibiade quitte son village natal et se lance dans un long voyage vers l’est. Cette quête initiatique et homérique sera comme tout voyage ponctuée de rencontres et de découvertes.
Par son sens de l’ouverture aux autres et son envie d’aller de l’avant, Albiciade va modifier un monde assez codifié, et finalement créer lui-même sa propre légende.
"Les pages sont présentées de façon étrange, m’explique ma fille de dix ans, représentant subjectivement un échantillon de lecteurs jeunesse, Normalement, la bande dessinée s’adapte au lecteur, et ici, c’est le lecteur qui doit s’adapter à la bande dessinée : c’est déstabilisant !"
C’est certainement cet aspect conceptuel qui a permis à Albiciade d’intégrer la sélection jeunesse du 43e FIBD. Le jeune auteur Rémi Farnos propose une composition et un découpage assez innovant. Une bonne partie des planches présentent un dessin/décor général, au sein de laquelle son personnage évolue case par case. D’autres auteurs avaient déjà entamé cette démarche, dont Andreas, notamment dans Capricorne (Rêve en cage.
A la différence de son aîné, dont il n’a pas encore la maturité, Farnos maintient le découpage en gaufrier, même s’il n’y a pas d’action dans la case. Il bouleverse aussi le sens de lecture, un parti-pris ludique dans les premières pages, mais qui lasse par la suite, lorsque le chemin de lecture devient plus confus. On en vient alors à lire les cases dans le désordre, ce qui nuit à la narration.
Cette technique de découpage inclut une limitation intrinsèque : la distanciation entre le héros et le lecteur. Même dans les pages qui ne présentent pas un dessin général, Farnos maintient de petites cases dans un champ large, certainement pour apporter une densité à son récit qui alterne avec les grandes pages plutôt basée sur l’action. Mais cette absence de gros plan ne permet pas au lecteur de s’identifier au héros. On suit alors ses aventures de loin, en se demandant ce qui va lui arriver sans vivre ses succès et drames auprès de lui.
Farnos fait encore preuve d’innovation en cassant son gaufrier, soit pour une case plein page pour donner la force nécessaire à sa séquence, et insuffler de l’émotion opportune au récit. Une double page propose également un découpage intéressant afin de multiplier les thématique du fond, tout en soignant une forme cassant volontairement le sens de lecture.
In fine, Albiciade se révèle intéressant pour des lecteurs rôdés à la lecture de la bande dessinée. Mais son aspect conceptuel déconcertera trop le jeune public pour qu’ils puissent en saisir le divertissement, ou la morale narrative. Qualitatif, mais pas un chef-d’œuvre.
(par Charles-Louis Detournay)
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