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Dernière chance : exposition « Coups de crayon ! » à l’Assemblée nationale du Québec

Par Marianne St-Jacques le 18 août 2019                      Lien  
Il ne reste plus que quelques jours pour voir « Coups de crayon! La satire politique en dessin ». Cette exposition gratuite consacrée à l’histoire du dessin de presse québécois – et plus particulièrement à la caricature politique – est à l’affiche jusqu’au 30 août à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du Québec.

Une grande exposition portant sur le dessin de presse satirique présentée dans un lieu éminemment politique : voilà l’idée derrière « Coups de crayon ! ».

En ces temps incertains pour le dessin de presse – fin de parution régulière pour Mad Magazine, disparition de la caricature politique dans l’édition internationale du New York Times, et congédiement surprise de Michael de Adder par le Brunswick News –, l’exercice est salutaire et permet d’apprécier le rôle de la satire politique dans nos sociétés libres et démocratiques [1].

Présentée par Martin Pelletier (coordination) et Pierre Skilling (recherche et rédaction), l’exposition « Coups de crayon ! » retrace l’histoire de la caricature au Québec, des origines à nos jours, à l’aide d’originaux, de reproductions et d’artefacts. Mettant en vedette certains des plus grands noms du dessin de presse québécois (Albéric Bourgeois, Raoul Hunter, Robert La Palme, Harry Mayerovitch alias Henri, Terry Mosher alias Aislin), l’exposition a également le mérite de présenter des illustrations publiées en français et en anglais et issues de tous les courants politiques : journaux conservateurs et libéraux, fédéralistes et souverainistes, nationalistes, catholiques et socialistes. Le tout accompagné de l’excellente brochure rédigée par Pierre Skilling, qui replace ainsi les œuvres dans leur contexte social et politique.

Dernière chance : exposition « Coups de crayon ! » à l'Assemblée nationale du Québec
Quelques illustrations d’Albéric Bourgeois, l’un des pères fondateurs de la bande dessinée québécoise.
Photo : Marianne St-Jacques.
Maurice Duplessis, premier ministre du Québec, dépeint sous les traits du « Napoléon laurentien » par Harry Mayerovitch dans Le Jour, 1939.
Photo : Marianne St-Jacques.
René Lévesque et Charles De Gaulle, Le Poing, avril 1968.
Photo : Marianne St-Jacques.

Avec des dessins qui remontent jusqu’en 1865 – C’est notamment le cas des caricatures de Charles-Henri Moreau parues dans Le Perroquet –, l’exposition permet également de parcourir l’histoire politique du Québec et du Canada à travers plusieurs moments forts : Confédération, pendaison de Louis Riel, Grande dépression, montée du fascisme et Deuxième Guerre mondiale, Grande noirceur, Révolution tranquille, Crise d’octobre, et référendums sur l’indépendance du Québec de 1980 et 1995.

Opposition à la Confédération : dessin de Charles-Henri Moreau paru dans Le Perroquet, 1865.
Photo : Marianne St-Jacques.
Caricature évoquant la pendaison de Louis Riel et les rébellions de 1837-38, réalisée par Vital Cassan, Le Canard, 1885.
Photo : Marianne St-Jacques
Crise d’octobre 1970 : le recours à la Loi sur les mesures de guerre dénoncé par Pierre Dupras (Québec-Presse).
Photo : Marianne St-Jacques.
Le maire de Montréal, Jean Drapeau, et le référendum sur l’indépendance du Québec de 1980 font la une des journaux.
Photo : Marianne St-Jacques.

Aussi, si certaines œuvres ont mal vieilli en raison de leur caractère raciste ou misogyne, force est de constater que plusieurs dessins demeurent d’actualité. C’est notamment le cas de ceux portant sur la rémunération des médecins spécialistes, sur le financement public de l’entreprise Bombardier, sur l’utilité du stade olympique de Montréal après les J.O. de 1976, sur les politiques d’austérité des différents gouvernements conservateurs, ou encore sur les élections générales. (Rappelons d’ailleurs que les Canadiens iront aux urnes au cours des prochains mois afin d’élire un nouveau gouvernement fédéral !)

Les élections provinciales dépeintes par John Collins, The Gazette, 1944.
Photo : Marianne St-Jacques.
Les élections dépeintes par Albéric Bourgeois, La Presse, 1948.
Photo : Marianne St-Jacques.
En 1970, la rémunération des médecins spécialistes faisait déjà l’objet de débats. Dessin de Pierre Dupras pour Québec-Presse.
Photo : Marianne St-Jacques.

D’un point de vue esthétique, les dessins « cubico-géométriques » de Robert La Palme se démarquent notamment par leur grande modernité. C’est ainsi que l’on peut admirer ses portraits d’Alexandre Taschereau, premier ministre du Québec et d’Athanase David, secrétaire de la province de Québec, de même que son Hitler « en un trait ».

Les dessins « cubico-géométriques » de Robert La Palme. À gauche, le portrait d’Hitler « en un trait » .
Photo : Marianne St-Jacques.

De même, les illustrations publiées dans certains journaux des années 1930, marqués par leurs accents propagandistes et leurs penchants communistes (Saul Field dans Clarté) ou fascistes (Huron dans La Nation et Albert Labelle alias Al Goglu dans Le Goglu) demeurent visuellement fascinantes et permettent de jeter un éclairage nécessaire sur ce chapitre parfois méconnu de l’histoire canadienne et québécoise.

Dessin réalisé par Huron pour La Nation, journal fasciste, 1936.
Photo : Marianne St-Jacques.
Dessin réalisé par Huron pour La Nation, journal fasciste, 1937.
Photo : Marianne St-Jacques.
Dessin réalisé par Saul Field pour Clarté, journal communiste, 1937.
Photo : Marianne St-Jacques.

L’exposition comporte également son lot de curiosités. C’est ainsi que l’on trouve ce qui serait peut-être la toute première caricature de l’actuel premier ministre du Canada Justin Trudeau. Datant du 2 janvier 1972, l’œuvre fait partie d’une série de dessins réalisés par Pierre Dupras afin d’illustrer un calendrier de l’année 1972 pour le compte de Québec-Presse. Le jeune Justin Trudeau apparaît dans une scène de la Nativité, en compagnie de ses parents Margaret et Pierre Elliott Trudeau, alors premier ministre du Canada. La trouvaille est astucieuse, puisque Justin Trudeau est effectivement né le jour de Noël, le 25 décembre 1971.

La toute première caricature de Justin Trudeau ? Calendrier réalisé par Pierre Dupras pour Québec-Presse, 2 janvier 1972.
Photo : Marianne St-Jacques.

De même, si plusieurs téléspectateurs se souviennent de Jean-Pierre Coallier à titre d’animateur du talk show Ad Lib (Radio-Canada), peu de gens savent que celui-ci a également été caricaturiste. Aussi, c’est avec une certaine surprise que les visiteurs peuvent admirer l’immense triptyque réalisé lors de son passage à la Tribune de la presse de l’Assemblée nationale.

Triptyque réalisé par Jean-Marc Coallier vers la fin des années 1960.
Photo : Marianne St-Jacques.

Enfin, notons également la présence d’Aline Cloutier alias Cloutié, l’une des rares femmes à pratiquer le dessin de presse. L’exposition comprend notamment l’original de son portrait de Claire Kirkland-Casgrain, première femme élue à l’Assemblée nationale. Aline Cloutier, qui serait possiblement la première femme caricaturiste au Québec, a récemment l’objet d’un article dans le quotidien Le Devoir visant à faire (re-)découvrir son œuvre.

Claire Kirkland-Casgrain par Aline Cloutier alias Cloutié, circa 1961-1973.

(par Marianne St-Jacques)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

« Coups de crayon ! La satire politique en dessin », exposition présentée à la Bibliothèque de l’Assemblée nationale du Québec jusqu’au 30 août 2019, à Québec. Visiter le site web officiel ou télécharger la brochure.

[1À noter que l’exposition « Coups de crayon ! La satire politique en dessins » est à l’affiche depuis le mois d’octobre 2017 ; celle-ci précède donc la série de nouvelles ayant ébranlé le milieu du dessin de presse au cours de l’été 2019.

 
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