Gaspard n’ a plus que ses brebis. Et son chien. Là-haut, sur sa grande montagne, il voit passer les saisons en accompagnant ses bêtes, sans chercher le contact humain. Mais une obsession assombrit son moral, déjà très atteint : les loups. En tuant la femelle qui vient de décimer son troupeau, il ne voit pas tout de suite le petit qui va bientôt prendre la relève. Et ce louveteau grandit très vite, occupe le terrain, et vient réclamer vengeance. La scène est dressée, le combat va commencer.
Récit frontal, limpide, ce one-shot magistral réserve bien sûr une surprise. Il ne s’agit pas ici d’arbitrer un combat à mort, mais de réfléchir, au côté de ce personnage à l’aigreur infinie, à une forme d’harmonie naturelle. Ce n’est pas un hasard si Rochette a demandé au philosophe Baptiste Morizot un texte qui ouvre un débat de fond.
Le trait à la fois net et lourd de Rochette percute ses paysages blancs des hachures impitoyables des visages et des reliefs. Une efficacité de thriller qui évite l’anthropomorphisme, les attitudes animales ne singeant jamais celles des humains. L’ampleur tragique du récit, sa morale libératrice et la force de la rédemption finale apportent des sensations fortes et profondes. Probablement un des meilleurs albums de l’année.
(par David TAUGIS)
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