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Dominique Brechoteau (Président du FIBD) : « Nous sommes prêts »

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 21 janvier 2006                      Lien  
Du Festival, on connaît son directeur général, Jean-Marc Thévenet et son directeur artistique, Benoît Mouchart. Mais leur patron, le président de l'Association du Festival International de la Bande dessinée à Angoulême, nommé précipitamment après la démission de son prédécesseur, est un peu moins connu. Ce bénévole aux faux airs de professeur Septimus n'en est pourtant pas moins impliqué dans la mise en œuvre de l'événement et ce, depuis longtemps.

Comment êtes-vous devenu président du Festival International d’Angoulême ?

Cela fait longtemps que je m’occupe du festival puisque j’y suis arrivé dès sa deuxième édition. Je suis quelqu’un qui s’est longtemps occupé des expositions et je suis beaucoup intervenu dans tout ce qui touche le domaine scolaire. J’ai créé le concours scolaire en 1975 et, depuis 1985, la Caisse d’Épargne est devenue notre partenaire pour ce concours qui est devenu un concours national énorme puisque nous recevons plus de 10.000 planches chaque année.

Dominique Brechoteau (Président du FIBD) : « Nous sommes prêts »
Rue Hergé
Cernée par les travaux, la statue d’Hergé va voir bientôt s’élever un chapiteau. Photo : D. Pasamonik.

Vous êtes prof d’Arts Appliqués. Comment s’est passée votre rencontre avec le Festival ?

Je suis arrivé au premier festival avec le public. J’y ai rencontré Francis Groux, qui en était, avec Jean Mardikian et Claude Moliterni, l’un des fondateurs. Francis m’avait remarqué parce que je venais avec mes élèves. En plus de cela, je m’occupais du CDDP, c’est à dire de toute l’action pédagogique des professeurs d’Art Plastiques et des Arts Appliqués. Par ce biais-là, on a monté le concours scolaire de bandes dessinées, et c’est comme cela que, petit à petit, j’ai pris une part un petit peu plus importante au Festival.

J’ai réalisé avec mon fils des bus décorés l’année dernière aux couleurs d’Hugo Pratt [1], et par Florence Cestac et Claire Brétécher l’année précédente.

Claire Bretécher, que vous avez connue sur les bancs de l’école...

On s’est connus à l’âge de dix-huit ans à l’École des Beaux-Arts de Nantes et puis on s’est perdus de vue.

Elle devait être très très jolie...

Elle l’est toujours ! Tous ceux qui étaient dans la même section qu’elle en étaient amoureux ! En plus de cela, elle dessinait déjà très très bien. Elle faisait de la bande dessinée depuis l’âge de douze ans. C’était une fille très timide, réservée, qui a beaucoup de caractère. Je l’ai donc retrouvée à Angoulême, où elle a eu le prix du dixième anniversaire. Quand Florence Cestac a eu son prix, j’ai eu l’idée de les réunir pour décorer un bus des présidentes.

Le Festival est une Association... Vous avez combien de membres ?

Il doit y avoir à peu près 80 membres. Ce sont des gens qui demandent pour entrer dans la société. L’association a des membres adhérents et des membres de droit [2]. C’est presque moitié/moitié actuellement, les membres adhérents sont un de plus que les membres de droit. Il y en a beaucoup qui sont de la région, mais il y en a qui viennent de Paris, de Poitiers ou de Bordeaux... Tout le monde peut s’inscrire. Il faut être parrainé par un membre du Conseil d’Administration et un membre de l’Assemblée générale.

Le bus "Hugo Pratt"
peint par Dominique Brechoteau et son fils. DR

Il faut donc déjà être un peu introduit dans le milieu de la BD pour pouvoir être membre de votre association...

Il faut être passionné. Si on est passionné, effectivement, on peut rencontrer des gens. On ne refuse pas de les parrainer.

Vous arrivez à la présidence du Festival à un moment où c’est le Big Bang. Physiquement, parce qu’il y a aujourd’hui un grand trou sur la place du Champ de Mars. Comment vous gérez cette nouvelle donne ?

J’ai déjà été président de 1991 à 1996, vice-président ensuite. Comme me l’avait dit Yves Poinot [3] quand il a pris la présidence en 1996 : « Nous sommes sur le même tandem, tu étais devant, j’étais derrière ; maintenant que je suis passé devant, tu es juste derrière... ». Donc, je ne découvre pas ces problèmes. À propos du Champ de Mars, il est tout à fait logique qu’une ville se modernise. Par conséquence, il est logique que d’un seul coup, le Champ de Mars soit investi par des travaux. On sait très bien, par contre, que ces travaux ne dureront qu’un an. Il suffit de voir ces travaux évoluer pour être convaincu que cela va aller très très vite : le trou est fait, ils sont en train d’installer les fondations, le béton a commencé à être coulé... On a déjà l’assurance que l’année prochaine, on aura la dalle. On pourra donc se réinstaller sur le Champ de Mars. Cette année, c’est vrai que c’est une année un petit peu particulière... Il faut d’ailleurs remercier la Ville d’Angoulême qui a fait un effort considérable pour maintenir les éditeurs sur le Plateau [4]. Une des conditions imposées par les éditeurs pour venir à Angoulême, c’est d’être dans le Centre-Ville. Quand on voit les chapiteaux qui sont installés tout autour de l’Hôtel de Ville, de la place du Palais, en haut de la rue de Cognac, c’est assez énorme comme travail et je tiens à les en remercier. C’est un travail qui a été commencé en décembre 2004. Nous avons eu le temps de nous habituer à ces nouveaux espaces...

Cela dit, cela a un impact sur l’économie globale du Festival puisque, pour des raisons techniques, vous ne disposez pas de la même surface commerciale disponible. Vous avez donc un manque à gagner...

Oui, on a la même surface totale mais on a plus d’espace pour la circulation donc, effectivement, on a un manque à gagner au niveau de la surface commerciale louée.

Place du Champ de Mars
A la place des "bulles", un grand trou... Ph : D. Pasamonik.

C’est une année financièrement difficile, du coup.

On sait qu’on a un festival difficile et on a fait le budget en fonction.

Il n’y aura donc pas de problème grâce à l’investissement de la ville. On peut d’ailleurs le constater.

Oui, et ce n’est pas parce que c’est une année un petit peu particulière que l’on a oublié la manifestation culturelle. On aura pratiquement le même nombre d’expositions que l’an dernier, et des expositions très variées.

Les années précédentes, avec quelque 200.000 visiteurs, c’était déjà limite au niveau de la circulation. Cet aspect a-t-il été sérieusement pris en considération ?

Apparemment, oui. Si les gens arrivent à bien gérer le parcours entre les chapiteaux et les expositions, réparties jusqu’à la Charente, ce sera formidable.

On peut donc être rassurés ?

Je le pense.

Dans le même temps, les institutions de la BD à Angoulême sont en pleine réflexion, prélude à la création d’un EPCC [5] qui réunirait les différentes entités de l’image à Angoulême, et dans lequel le Festival a décidé de ne pas aller...

Il faut reprendre les choses dans l’ordre. Il y a eu un article dans Le Monde de Jean-Marc Thévenet à propos de subventions versées pour le développement de la bande dessinée. Les acteurs locaux ont demandé au gouvernement une étude pour savoir s’il était nécessaire de faire un EPCC...

C’est le fameux « rapport Ladousse »... Et quel est le résultat de cette réflexion ?

Ce sont les élus qui, au départ, ont commandé cette étude, qui décideront ce qu’il y a lieu de faire.

Le festival est indépendant de la décision des élus...

Il faut demander au maire d’Angoulême, M. Philippe Mottet, et au président du Conseil Général M. Michel Boutant [6], quel est leur sentiment sur cette question... Il y a trois possibilités : L’EPCC avec le Festival ; l’EPCC avec le festival comme filiale ; le festival hors de l’EPCC. Il faudrait leur demander quelle est leur position ; ensuite l’assemblée générale de notre Association Loi 1901 prendra sa décision.

Votre prédécesseur n’était pas favorable à une absorption. Vous êtes entre deux dangers : celui d’être absorbé par un « grand machin » et de perdre votre identité ; et celui d’être marginalisé face à une entité qui a des moyens plus appréciables que les vôtres et qui va faire fonctionner pleinement ses synergies. Vous êtes un peu à la croisée des chemins...

On a des choix à faire mais ils ne nous appartiennent pas complètement. Ces choix, on les fera en accord avec ceux de la Mairie et du Conseil Général.

Propos recueillis le 16 janvier 2006.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

En médaillon : Dominique Brechoteau, président du Festival International de la BD à Angoulême. Photo : D. Pasamonik.

Festival International de la BD à Angoulême
Du 26 au 29 janvier 2006.
Plus d’infos : Le Site du Festival

[1Le fils de Dominique Brechoteau est décédé avant que le bus ne soit achevé et c’est l’actuel président du Festival qui l’a terminé, avec l’aide d’Yves Poinot, son prédécesseur.

[2Parmi les membres de droit statutaires, il y a par exemple les fondateurs de la manifestation, mais aussi des institutionnels comme les représentants de la ville d’Angoulême.

[3Le prédécesseur de Dominique Brechoteau, démissionnaire en octobre dernier.

[4Le centre de la Ville d’Angoulême est situé sur un plateau qui domine les rives de la Charente.

[5Établissement Public à caractère Culturel et Commercial. NDLR

[6M. Mottet est maire UDF (droite) de la ville d’Angoulême ; M. Boutant, président du Conseil Général, est PS (gauche).

 
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