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« L’Ombre » de Hugo Pratt et Alberto Ongaro - chez Casterman

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 6 juin 2004                      Lien  
Créé en 1964 par deux Vénitiens admirateurs de la BD américaine, le scénariste Alberto Ongaro et le dessinateur Hugo Pratt qui n'avait pas encore créé {Corto Maltese}, cette oeuvre vaut surtout par sa révérence à une certaine BD d'aventure de l'Age d'Or du comic-strip.

Mais laquelle ? En voyant la couverture, on pense d’abord à « L’Ombre qui marche », le sobriquet du Fantôme du Bengale (The Phantom) créé par le propre créateur de Mandrake, Lee Falk en 1936 (il en dessina même les premiers strips, avec un coup de main de Ray Moore à l’encrage). Le personnage est saisissant de ressemblance. Pourtant, le préfacier Claudio Bertieri, dans l’énumération des sources de cette œuvre, évoque seulement Brick Bradford (la première BD de SF de William Ritt et Clarence Gray) en se focalisant sur l’usage burlesque des robots. Il en appelle aux mânes de Jules Verne, d’H.G. Wells, de Stevenson, de Melville, de Conrad et même de Lewis Carroll... Et tant qu’on y est Frank Capra. Pourquoi pas ? Il ressort curieusement les gadgets du James Bond de Ian Fleming du placard pour mieux camoufler les emprunts à Batman. Il évite surtout, et soigneusement, la référence au Phantom, comme si cela sentait le souffre, ou peut-être une éventuelle revendication en paternité.

Référence pour référence, il aurait pu aussi citer Faulkner qui, comme me l’a fait remarquer mon ami le poète Gilles Jallet (auteur d’un recueil intitulé « L’Ombre qui Marche ») commence le monologue de Quentin dans Le Bruit et la Fureur par « When the Shadow... » Ou encore Giorgio de Chirico qui dit : « Il y a plus de mystère dans l’ombre d’un homme qui marche au soleil que dans n’importe quelle religion passée, présente ou future. » Ces joutes référentielles n’enlèveront rien au fait que cet album, pour être agréable à lire et d’une facture digne de figurer dans votre bibliothèque prattienne, n’a pas la force de ses œuvres ultérieures, pas même celle des Ernie Pike du regretté Hector Oesterheld. A côté, L’Ombre sent un peu la commande, même si elle s’émerveille avec délectation des modèles américains et si le design des architectures très soixante lui donne un charme que l’on ne croyait connaître qu’à la lecture des Modeste & Pompon de Franquin.

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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