Dans cet album ayant pour cadre le Rwanda des années 1990, les derniers descendants de la lignée sont sur le point de trouver une issue et une explication à l’étrange malédiction qui semble peser sur eux depuis plusieurs générations.
À la veille des massacres inter-ethniques de 1994, nous retrouvons le petit-fils de la famille : David. Intervenant humanitaire en Afrique, le jeune homme épouse la cause des Tutsis à la fois par humanisme mais aussi par amour pour la belle Eda.
David a une sœur jumelle, Diane, sur laquelle plane aussi la curieuse menace héréditaire. À l’approche de ses trente-trois ans, Diane, artiste-peintre, est enceinte et redoute d’être elle-aussi l’objet de la malédiction de son frère. Lequel des deux risque-t-il de disparaitre dans des circonstances aussi dramatiques que leurs ancêtres ?
C’est alors que surgit un… revenant : Antonin, le jeune homme idéaliste que l’on avait laissé dans les combats de l’Espagne de 1937 ! C’est aujourd’hui un vieil homme qui a bourlingué dans le monde et opéré de nombreux trafics (voir l’épisode 3) mais qui a aussi suffisamment de relations dans tous les milieux pour tirer d’affaire ses petits-enfants !
Manifestement investi d’une mission auprès des deux jeunes, il va arracher les deux jumeaux des griffes des extrémistes rwandais dans des circonstances un peu rocambolesques et leur permettre d’échapper aux massacres. En sauvant David et Diane, Antonin mettra un point final à la malédiction qui frappait la famille. Une conclusion heureuse malgré quelques invraisemblances et autres tours de force scénaristiques.
Inspiré des méthodes d’écriture « à l’américaine » réunissant plusieurs scénaristes et dessinateurs La Lignée ouvre de nouvelles perspectives en matière éditoriale. Exercice de style exigeant pour les auteurs sollicités à cette occasion (Laurent Galandon, Olivier Berlion, Damien Marie et Jérôme Félix), l’aventure débouche sur une conclusion honorable mais en demi-teinte. Boucler cette histoire entre fantastique, saga familiale et aventures historiques n’était pas chose facile.
Si l’itinéraire personnel du héros au cœur de l’histoire est la marque de fabrique de nombreux albums de Grand Angle), le postulat fantastique de départ (la mort étrange à l’âge de trente-trois ans dans des circonstances dramatiques) semble ici passer au second plan.
Le mystérieux agenda témoin entre les différents protagonistes, l’étrange statue antique… tous ces éléments semblent s’être dilués peu à peu au fil du déroulement de l’intrigue. Donnons acte à Jérôme Félix de la difficulté de « boucler » une histoire touffue, captivante mais dont l’issue restait peut-être hors d’atteinte.
On relèvera le parti-pris d’une vision politique et sociale à travers le prisme de contextes historiques forts et emblématiques comme la Guerre d’Espagne, la France de l’après-Guerre ou le génocide au Rwanda. La similitude des destins personnels (abandon des enfants par leur père, éloignement géographique et affectif, climat conflictuel...), donne à cette traversée du siècle un ton personnel et attachant.
Une vision romanesque qui apporte une belle cohérence à un projet éditorial original dont la lecture procure plaisir et émotion.
(par Patrice Gentilhomme)
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