On commence à bien le situer, ce modeste travailleur avec ses lunettes rondes et son nez anguleux. Apprenti, puis ouvrier, il exerce la profession d’ajusteur pour les chantiers navals de la région de Bordeaux. Tandis que son frère n’échappe pas au travail obligatoire en Allemagne (le STO, imposé après la capitulation de la France), Jacques ne force pas la cadence, sachant qu’une partie de son labeur bénéficie aux occupants. D’autant qu’en cette année 1942, le débarquement en Afrique du Nord redonne espoir à de nombreux Français. Mais tout inquiet qu’il est pour son frère, Jacques ne peut réfréner son attirance pour une demoiselle qu’il vient de rencontrer...
L’intime, le quotidien, la famille, mais aussi la grande histoire : Bruno Loth parvient toujours, comme dans les tomes précédents, à équilibrer ces éléments pour raconter cette saga familiale. Un peu comme si on prenait un cours d’histoire dans le salon du grand-père.
On s’aperçoit avec Ouvrier, de la façon très concrète dont certains citoyens envisageaient la résistance, tout en gardant une oreille collée à Radio Londres. Pas d’héroïsme, mais un état d’esprit vigilant.
Loth n’oublie pas d’évoquer la Shoah et l’antisémitisme. L’obsession nazie apparaît dans toute sa bêtise dans une scène marquante ou Jacques est interrogé par des SS à cause de son nez... L’album et la trilogie n’ont rien d’une lecture scolaire ou moralement obligatoire, mais ils offrent un témoignage singulier qui n’exclut aucun public et garde un crédo humaniste constamment touchant.
(par David TAUGIS)
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lire également les tomes précédents :
Apprenti (Mémoires d’avant-guerre)
Ouvrier, mémoires sous l’occupation (1ère partie)
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