Des yeux injectés de sang, de très vives traces de strangulation au cou... C’est sûr que le look de Rachel peut en effrayer plus d’un. D’autant que si tous ses signes vitaux indiquent qu’elle devrait être morte, Rachel ne ressent rien de tout cela et continue à se comporter comme lorsqu’elle était vivante, pleinement vivante.
Et tandis qu’elle tente de cerner les circonstances de son assassinat, en ville, une mystérieuse femme pousse, comme par magie, d’honnêtes citoyens à commettre d’atroces crimes. Y aurait-il, comme le pense de Docteur Siemen, un ange de la mort à l’œuvre au sein de leur communauté ? Ou bien tout cela ne serait-il pas lié à un massacre de jeunes femmes accusées, il y a bien longtemps, de sorcellerie ?
Rachel Rising s’offre comme un excellent renouvellement du genre horrifique. Depuis la manière de poser une situation jusqu’à celle de déployer l’intrigue, par un montage narratif habile et efficace, tout ici est de grande qualité.
Notamment la caractérisation des personnages, précis, justes et vraisemblables dans leurs comportements et réactions. Bien "vivants" en somme, comme pour contredire cette histoire de revenants. On a particulièrement plaisir à suivre les déambulation de cette pléiade de femmes, jeunes et moins jeunes, qui organisent et conduisent l’action.
Du point de vue graphique, les choix effectués apparaissent sobres et efficaces : dessin en noir et blanc, pour l’essentiel des gros plans sur les personnages pour mener les dialogues ponctués de quelques vues d’ensemble qui contextualisent l’action, et un découpage classique des planches à l’aide de cadres rectangulaires réguliers produisant par moments une impression de séquençage cinématographique. Tout cela suffit amplement à instaurer une tension réelle baignant dans une subtile atmosphère horrifique.
Figure importante du paysage du comics indépendant aux États-Unis Terry Moore n’en est pas à son coup d’essai. L’auteur s’adonne autant aux récits réalistes et intimes qu’à ceux de genre et il a, afin de pouvoir publier comme il le souhaite ses propres histoires, développé son propre label : Abstract Studio.
Ainsi, Strangers in Paradise, débuté en 1993, reçut l’Eisner Award de la meilleure série en 1996. Sa publication en France, compliquée (voir ici et là), s’est récemment achevée chez Kymera. Après ce succès, dans les années 2000, Terry Moore fit quelques incursions du côté du mainstream sous forme d’épisodes spéciaux ou de courts runs (Buffy, Spider-Man, Birds of Prey, Ultimate Marvel Team Up ou encore Les Fugitifs dont nous vous avions parlé).
Revenu à une production plus personnelle à la fin de la décennie avec Echo, publié chez nous par Delcourt, il lance Rachel Rising en 2011. La série est en cours et compte vingt-quatre numéros en avril 2014. Chaque volume en réunissant six, les quatre premiers tomes constitués forment un tout d’un point de vue narratif comme l’indique l’auteur dans une récente interview.
De quoi piaffer d’impatience en attendant que Delcourt publie la suite.
(par Aurélien Pigeat)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Rachel Rising T1 : "Dans l’ombre de la mort". Par Terry Moore. Traduction Anne Capuron. Delcourt collection "Contrebande". Sortie le 16 avril 2014. 128 pages. 13,95 euros.
Commander ce livre chez Amazon ou à la FNAC
Lire les chroniques de Strangers In Paradise : celle du volume 3 et celle du volume 13
Participez à la discussion